Le contenu du silence de Lucía Etxebarria : un thriller psychologique poignant

« Gabriel, mélancolique, contemplait le coucher de soleil à travers la vitre, un crépuscule doux et doré, sans vent, une fin de journée superbe, où chaque rayon de lumière venait mourir contre le clapotis des vagues plus doucement encore que le précédent. Une symphonie de couleurs, du pourpre au jaune en passant par tous les tons possibles de rouge, de rose et d’orangé, comme pour lui signifier que la nature, elle, se moquait bien du sort de Cordelia. »


Les premières lignes in medias res du dernier roman de Lucía Etxebarria laissent doucement pénétrer le lecteur dans un environnement plutôt commun, le cadre d’un appartement londonien et le quotidien d’un jeune couple : Gabriel et Patricia. Une petite vie bien rangée qui laisse apparaître, dès le début, de très flagrants signes de malaise. Leur mariage est prévu dans les semaines à venir et pourtant, pour Gabriel, l’absurdité de cet acte va s’avérer toujours plus réel au fur et à mesure du récit.


L’intrigue : Gabriel apprend que sa sœur partie vivre aux Canaries est portée disparue. N’ayant plus de contact avec elle depuis plus de dix ans, il décide de partir à sa recherche. C’est alors que l’histoire va basculer dans une enquête palpitante. Gabriel, accompagné d’Helena – la meilleure amie de Cordelia – vont, de fil en aiguille, faire avancer les recherches. A son arrivée sur l’île, il apprendra par cette amie la longue descente aux enfers de Cordelia vers une secte qui a poussé au suicide collectif ses propres membres.


Le contenu du silence est l’histoire de profondes révélations, ce genre de révélations que l’on ne fait qu’en dernier lieu, dont le contenu nous semblait si occulté par le temps et ce que l’on avait entassé dessus qu’il était improbable qu’elles ressurgissent. Le mensonge, cette faculté à dire ou éprouver de faux-semblants, surtout lorsqu’il s’agit de se mentir à soi-même, est sans doute l’une des choses les plus difficiles à s’avouer. Savoir faire le vide, se poser, mettre en ordres ses idées, ses pensées et ses sentiments, puis savoir ce que l’on veut vraiment. Le récit n’apporte pas toutes les réponses, mais il fait cependant ressurgir le lien possible entre les actes perpétrés par nos parents ou ancêtres et nos façons d’agir dans le présent. Des théories fumeuses et controversées qui sont toutefois agréablement bien illustrées dans ce roman.


Ne me considérant pas comme une fervente admiratrice des ouvrages de Lucía Etxebarria, je dirais néanmoins que c’est un thriller psychologique tout à fait prenant, au décor paradisiaque charmant et périlleux à la fois, pourvu d’un côté pragmatique. Un témoignage sans grande prétention, adroitement mené puisque le suspense reste à son comble jusqu’aux dernières pages. Une parfaite illustration de la loi du plus fort, des effets dévastateurs sur les plus faibles, mais aussi des conséquences tragiques des transgressions familiales.

 

Elodie Blain


Lucía Etxebarria, Le contenu du silence, Traduit de l’espagnol par Nicolas Véron, 10/18, mai 2013, 384 pages, 8,40 euros.

3 commentaires

Je ne suis pas non plus grand fan de Lucía Etxebarria, elle avait pourtant tout pour mais il me semble qu'elle a vite glissé dans un conformisme un peu pépère, surfant sur les clichés sociaux à bon compte... bref, dommage.

Merci pour votre article. 

Il est vrai qu'elle a tendance a user d'images grossièrement dépeintes de nos sociétés modernes. Cependant j'avais décidé après la lecture de Beatrice et les corps célestes, de lui laisser une chance avec ce dernier ouvrage. Le style n'a pas changé, on reconnait son écriture "facile", mais celui-ci se lit plutôt bien. Mon avis reste mitigé. Toutefois, après avoir lu le dernier Vargas Llosa, Lucia Etxebarria vient comme un livre de repos...Il a son rôle!

C'est vous qui avez raison, un livre ne suffit pas pour se faire une idée d'un écrivain... pire même, un Ecrivain peut bien passer une vie à nous pondre des livres plus que moyen pour finalement donner naissance à un chef-d'œuvre... pour ce qu'il en est de la distraction, personnellement je préfère la trouver au cinéma ou dans les bonnes séries Tv désormais plutôt que dans la littérature... peut-être parce que j'attends trop d'elle...

Bonne journée :-)