Les Insatiables : pot de terre vs pot de fer
Partant d’un fait divers – une prostituée assassinée – un journaliste vertueux se lance dans une quête impossible, d’autant que le meurtre remonte à trente ans. Le présumé coupable n’étant confondu qu’à l’aide de nouveaux fragments d’ADN retrouvés sur un objet de la scène de crime. Marc remonte donc patiemment la filière, conglomérat chimique qui fabrique des composants pour l’alimentation animale et oublie de préserver la santé de ses ouvriers qui succombent de cancers ; trafic d’influence, politiciens corrompus…
Rien de bien nouveau dans la trame.
L’intérêt de ce volumineux roman réside dans l’analyse croisée des milieux sociaux (Paris vs province, laïcs vs religieux, grands bourgeois vs ouvriers) avec une plongée dans les milieux de la prostitution et celui des affaires (politiques et commerciales).
Marc, l’héritier d’une immense fortune, a choisi de joueur le Robin-des-bois de la morale plutôt que de présider le groupe familial, or il en oublie un peu trop vite d’où provient sa fortune, ce filet invisible qui le sécurise et lui permet toutes les audaces, ne craignant pas le chômage... Si la traque lui offre l’adrénaline indispensable à son mode de vie, son enquête pèchera par le manque de clairvoyance que son statut même devrait lui révéler. Mais les œillères sont pour tout le monde. Et ce ne sera que l’aide d’un stagiaire totalement objectif, plus un dîner avec le bras droit de son grand-père, actuel président du groupe, qui lui dessilleront les yeux, apothéose à la toute dernière page, puisque l’on ne fait jamais d’omelette sans casser des œufs, maxime que même un Marc rebelle qui crache dans la soupe se doit d’admettre.
Le monde libéral est ainsi fait. On ne le refera pas.
François Xavier
Gila Lustiger, Les Insatiables, traduit de l’allemand par Isabelle Liber, Actes Sud, septembre 2016, 384 p. – 23,00 euros
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