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Sauvons le beau, l'esthétique à l'ère numérique

Alors que sont exposés comme les chefs-d'oeuvre contemporains ce qu'Alain Finkielkraut appelle des "gros jouets criards" - ceux notamment de Jeff Koons -, le philosophe et professeur à l'Université des Arts de Berlin Byung-Chul Han montre que la vacuité actuelle de l'Art, et de la société, vient d'un absolutisme du lisse. Le Beau, tel qu'il se conçoit aujourd'hui (aussi bien pour les smartphones que les oeuvres d'art en elles-mêmes ou la personne humaine avec le diktat de l'épilation par exemple), est d'abord lisse, sans marque de fabrique, sans trace, comme incréés. Le lisse, c'est l'absence de profondeur car l'image qui est renvoyée n'est autre que celle du spectateur, dans une mise en scène de la vacuité et de la gratuité du geste artistique, par là même nié. Le lisse est l’ennemie du beau tel qu'il advient après une étude poussée des philosophes (Adorno, Hegel, Edmund Burke, Walter Benjamin...) et un regard critique (au sens propre du déploiement) sur la "production" contemporaine et son anomalie pathologique : lisse, l'art ne dit plus rien, n'a plus rien à dire, il se pose comme un "étant" infécond, Dasein du pauvre, limité à la seule fonction d'objet de consommation... 

Sauvons le beau, l'esthétique à l'ère numérique est un essai très critique et très revigorant, une manière de cure pour réapprendre à comprendre ce qu'est l'Art, et à en exclure ces objets de pure consommation, reproductibles, lisses et vide, n'appelant à aucun questionnement esthétique. Sauver le beau, c'est ne pas confondre les domaines et les enjeux, ne pas pervertir les fondamentaux de l'Art pour satisfaire à l'inculture crasse du temps.

Loïc Di Stefano

Byung-Chul Han, Sauvons le beau, l'esthétique à l'ère numérique, traduit de l'Allemand par Matthieu Dumont, Actes sud, "questions de sociétés", novembre 2016, 128 pages, 13 eur

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