Généreux, animateur à côté de Lindon des Éditions de Minuit au plus haut point, Robbe-Grillet fut le propagandiste non seulement de son œuvre mais de celles et ceux qu'il accompagna dans leurs différentes stratégies.
Benoît Peeters renouvelle la vision de l'auteur, montre ce que ce dernier cachait sous ses textes "théoriques" qui furent souvent des cache-fumées. Aventurier du langage il en éprouve les limites sous l'égide implicite de Kafka en sa mise en évidence l'opacité du monde et le labyrinthe des êtres.
Robbe-Grillet, souvent critiqué pour ses engagements premiers, est par essence un écrivain courageux – réputé à tort "dur" face à Butor. Son écriture estimée non engagée n'est néanmoins en rien dégagée.

L'auteur a  soutenu bien des causes et écrivain de Duras à Echenoz. À la première, il a fourni le bon titre Détruire, dit-elle en place du simple Détruire comme il a défendu la voix singulière de Pinger. Maître du renouvellement formel il devient aujourd'hui l'image d'un paradis perdu où se refonde la littérature.
Pour lui néanmoins la littérature ne s'arrête pas au Nouveau Roman. Ce ne qu'une étape qu'il a franchi par le cinéma comme par ses derniers livres. Il n'a cessé de surprendre et Peeters le prouve en montrant sous le timide, l'obstiné.
L'ingénieur agronome (comme Houellebecq) et spécialiste des maladies du bananier a sut par la littérature trouver un monde qu'il était le seul à pouvoir créer – ce qu'il fit comme il le réalisa au cinéma d'abord avec Resnais puis en maître de cérémonie de ce qui jusque-là ne se contait ni se montrait comme il le fit.

Jean-Paul Gavard-Perret

Benoit Peeters, Robbe-Grillet. L'aventure du nouveau roman, Flammarion, août 2022, 430 p., 22,90€
Benoit Peeters, & Alain Robbe-Grillet., Réinventer le roman, coll. Champs Essais, Flammarion, septembre 2022, 318 p.-, 12€