Amitié distante entre Breton et Paulhan

Cette correspondance de plus de 40 ans nous place au cœur de la littérature en effervescence de la première moitié du XXe siècle. D'un côté le Surréalisme et ses remugles, de l'autre la défense et illustration de  la littérature par la NRF.

Son directeur comme le pape du surréalisme se retrouvent en complicité intellectuelle. Paulhan a d'ailleurs frayé un temps avec les aventures post-dadaïstes, mais ayant compris le rôle que le jeune patriarche du rêve jouait en ce qui tenait non seulement d'une avant garde mais d'une institution (La NRF pouvait en faire partie et servir ce que Breton voulait imposer extra-muros) il se replia dans un splendide isolement gage de lucidité active.

Certes Breton voit en Paulhan un vecteur de reconnaissance non négligeable à ses yeux. Quant à Paulhan, il est moins animé de volonté de puissance que son alter égo. Et cela n'est pas sans importance pour une si longue amitié.

Paulhan n'est pas dupe. Mais si l'amitié est distante elle existe réellement. Elle anime ces missives où s'agite le tout Paris (à l'époque le presque tout monde) des lettres et des arts. La modernité est là et permet de mieux comprendre le rôle et la philosophie de deux écrivains importants. Paulhan peut-être plus que Breton lui-même. Celui-ci allait se perdre dans une littérature discursive, Paulhan à l'inverse allait vers l'affinement d'une exigence littéraire aujourd'hui encore insuffisamment mise en lumière.
 

Jean-Paul Gavard-Perret

André Breton, Jean Paulhan, Correspondance. 1918-1962, édition de Clarisse Barthélémy, coll. Blanche, Gallimard, novembre 2021, 256 p.-, 22 €
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