Nous sommes à New York, à Wall Street plus précisément, dans les années 80 et ils sont une poignée de jeunes hommes. Leur particularité ? Ils ont de l’argent, beaucoup d’argent et enchainent les deals à un million de dollars, les fêtes folles, les drogues dures, l’alcool et le sexe. Régnant sur la finance, ces golden boys qui ont perdu tout repère symbolisent ce qui s’est emballé aux États-Unis. Rooney, le narrateur, a l’arrogance du prédateur, la morgue du vampire de la fête, l’adrénaline chevillée au corps .Tout lui réussit jusqu’à la chute, fitzgéraldienne en diable, aussi brutale que le fut l’ascension. Viré en cinq minutes de « La firme » qui l’employait, il se retrouve divorcé .Le sida pointe le bout de son nez, la crise économique est là, le 11 septembre se profile à l’horizon.

Mais, sous la plume de Goolrick, écrivain d’une humanité rare, ce qui pourrait n’être que le récit d’une dégringolade de plus tourne au récit magistral. Pris entre remords et nostalgie, Roone, va être sauvé par la conscience de sa propre responsabilité. C’est toute la différence avec les héros de Bret Easton Ellis qui ne voit les hommes que comme des esclaves de leurs vices. On pense à Gatsby et au Bûcher des vanités, à Steinbeck aussi pour la narration. Peut-on tirer de la décadence une forme de beauté ? Avec brio, Goolrick répond par l’affirmative.

Ariane Bois

Robert Goolrick, La chute des princes, Robert Goolrick, éditions Anne Carrière, traduit de l’anglais (États-Unis) par Marie de Prémonville, aout 2014, 360 pages, 21,50 €