Anne Wiazemsky, Une année studieuse : indigne !

Déjà en 2012, je me posais ouvertement la question : 

le nombril d’Anne W., qui est certainement d’une rare beauté, méritait-il pour autant un livre ? Et la complicité qui la lie depuis l’adolescence avec Antoine G., éditeur, justifiait-elle sa publication ? Certes non, mais les temps sont ce qu’ils sont. 

Or, voilà-t-il pas que Folio remet le couvert  alors que, par exemple, on attend toujours la parution de La géométrie des variables en poche... Mais l'auteur n'est pas un intime de Monsieur G.


Lequel devrait certainement recentrer son attention sur la gestion de son entreprise et revenir plutôt sur la décision prise en 2010 de publier in extenso, en poche, sans même faire relire les titres sélectionnés. Un jeu pervers d’économies non justifiées qui conduit à vendre des livres avec des coquilles qui nous offrira donc, dans quelques mois, le Goncourt 2011, L’Art français de la guerre avec plus d’une vingtaine de fautes (sic)... Oui, monsieur G. ne devrait pas abonder dans ce sens commun qui veut que l’on publie toujours plus. 39 054 livres publiés en 1990 contre 74 788 livres en 2009... S’il veut faire des économies, monsieur G., il lui suffit de publier moins. À commencer par s’éviter celui-ci... 


Et ne pas verser dans le pathétique car, si Anne Wiazemsky n’était pas la petite-fille de François Mauriac, si elle n’était tombée amoureuse de Jean-Luc Godard, ne l’avait épousé, etc. qui voudrait lire son livre ? Personne, tant il ne procure aucun plaisir puisqu’il ne comporte aucun style et que l’histoire est d’une platitude rarement atteinte... avec des poncifs dignes d’une adolescente...


Anne sort d’un tournage avec Bresson. Anne part en vacances dans le Midi. Anne reçoit la visite de Godard. Anne rentre à Paris. Anne réussit l’oral de son baccalauréat. Anne adopte une chienne. Anne se fait gronder par son grand-père. Anne couche avec Godard. Anne est mineure (19 ans) et J.C. en a 17 de plus. Anne s’inscrit en philo à Nanterre. Anne n’aime pas la nouvelle fac de Nanterre. Anne se fâche avec Godard. Anne s’enfuit en Normandie. Etc. Et que dire des dialogues ?


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- Tu diras à ton grand-père que Nadja est belle « comme la rencontre fortuite d’un parapluie et d’une machine à coudre sur une table de dissection. » C’est la définition que Lautréamont donne de la beauté dans Les Chants de Maldoror. André Breton l’a reprise à son compte pour définir le surréalisme. Je suis certain que cela lui enlèvera l’envie de dire qu’elle est vilaine. Et toc !" Ainsi parlerait Jean-Luc Godard par le truchement d’Anne Wiazemsky. Las ! 


Lequel Jean-Luc n’aurait même pas bénéficié de la courtoisie de l’auteur qui ne lui a pas envoyé son livre (dixit Le Monde). Quand on connaît l’intelligence du plus français des réalisateurs suisses, on comprend très vite pourquoi. Il y aurait eu un retour cinglant à l’envoyeur...

On a vraiment l’impression de lire le journal d’une gamine de CM2, un sentiment partagé d’ailleurs par un lecteur qui informe, sur amazon.fr, de passer son chemin et d’aller voir ailleurs...


Alors comment expliquer ce déferlement dans les médias dominants pour des écrits de midinette, dans les premiers jours de janvier 2012 ? Ces louanges teintées d’hystérie à se trémousser le stylo dans des chroniques pleine de sirop qui évoquent la Nouvelle vague, la fin des années ’60, et après ? Ce n’est pas avec son carnet mondain que l’on devient écrivain ! Publié, certes, mais pour ce qui est de l’œuvre, tout est à revoir ! Rien ici ne justifie une pleine page dans Le Monde, dans Elle, etc. qui ne sont que preuves supplémentaires d’un copinage de façade qui n’est là que pour inciter le chaland à acheter un produit... Exit le livre. Mais où donc la littérature a-t-elle bien pu disparaître pour que nous en arrivions à un tel degré de concupiscence et de consanguinité ?


Gallimard avait publié, en septembre 2012, en Folio Incidences, le Djian de 2010, un monument, lui, de littérature célébrée, de style grandiose, de phrases ciselées au millimètre, d’une force hallucinante, qui claquent comme feux d’artifice un 14 juillet... On vous conseillera donc de vous porter sur ce choix-là.


François Xavier

 

Anne Wiazemsky, Une année studieuse, Folio, octobre 2013, 288 p. – 6,60 €

Initialement paru dans la collection "Blanche", Gallimard, janvier 2012, 262 p. – 18,00 €

1 commentaire

des articles de cette verve et de cette transparence, on en veut plus souvent ! Merci !