L'île aux enfants

En ce 10 novembre 1963, à la Réunion, deux petites filles, Clémence et Pauline vont chercher de l’eau à la rivière. Mais ce qui commence comme un conte dans une nature luxuriante, bascule dans le cauchemar : une  2CV rouge apparaît, s’arrête. Les deux adultes à bord, kidnappent les deux fillettes, faisant valser leurs seaux  et leur avenir.
Une génération plus tard, Pauline, rebaptisée Isabelle qui s’est mariée a presque oublié son enfance, sa soeur. C’est sans compter sur Caroline, sa fille, étudiante qui entendant un jour à la radio, l’histoire des petits réunionnais arrivés en métropole, décide d’enquêter.
Mue par un pressentiment, elle va chercher à découvrir la vérité sur les enfants de la Creuse, ce trafic d’un autre âge.

Il s’agissait selon Michel Debré, l’instigateur du projet de donner une chance aux jeunes défavorisés d’outre mer, tout en repeuplant des régions françaises en déficit d’habitants. Le programme fut un désastre moral et humain total. Les enlèvements arbitraires, sans le moindre consentement des parents, ni même leur information, furent suivis par des placements aléatoires chez certaines familles qui cherchaient avant tout une main d’œuvre gratuite ou bien pire. Rares furent ceux, sur les deux mille deux cent petits concernés à échapper aux abus sexuels, au travail forcé.

Dans son septième roman, Ariane Bois poursuit sa double quête sur  le secret des origines, l’enfance brisée,  démarrée avec les enfants cachés durant la seconde guerre mondiale dans Le monde d’Hannahet Le gardien de nos frères ; les rapports complexes, le dialogue interrompu avec la mère dans Sans oublier.
En s’emparant de ce scandale d’Etat méconnu, l’un des plus importants de la cinquième république, elle parvient en accord avec son titre qui évoque une émission enfantine et se révèle d’une âpreté  rare, à mêler émotion et vérité historique dans un livre puissant.
 

Brigit Bontour

Ariane Bois, L’île aux enfants, Belfond, mars 2019, 240 p.- ; 18 €

Aucun commentaire pour ce contenu.