Arnaud Cohen : fraîcheur, délicatesse, humour

 

Arnaud Cohen prend un malin plaisir à embourber le spectateur dans un flot de signes et informations visuelles. Animé d’une pulsion créatrice il poursuit son expressionnisme figuratif - même s’il faudrait nuancer une telle définition - et ses farces optiques qui ne sont jamais gratuites.

Maître d’une rhétorique ironique il crée une émotion particulière en faisant de chaque image un moment de provocation parfois subtile parfois plus fractale (comme lorsqu’il se transforme en chauffeur pour "dames").
C’est sa manière de réenchanter le monde. Ses déjeuners sur l’herbe sont troublés par une volonté "cosmétique" d’un genre particulier.

L’imaginaire renvoie la réalité comme l’histoire de l’art à une fin de non-recevoir. Et le basculement dans l’irréel contredit la pression du labeur sous lequel tant de faiseurs ploient. Arnaud Cohen la retourne comme un gant. Il s’amuse. Mais pas seulement.
Ses signes acquièrent une propriété réversible dans les extensions infinies que son art sous diverse formes propose.
Les œuvres participent d’un singulier mélange entre une radicale extériorité aux choses et une sensibilité exacerbée à l’égard des relations qui leur sont socialement imposées.
 

Prises, redécoupages transforment l’objet en signes, le projette dans un monde fantasmatique dont les clés tiennent de l’ordre d’une morale immanente, peut-être pas étrangère à celle qui était sous-jacente aux "mythologies" de Roland Barthes.

Chaque proposition devient autant le commentaire du réel que sa mise à mal. La portée des images et du langage qui l’artiste tord devient impondérable puisque chacune œuvre engage du semblable et du dissemblable, de la critique "politique" mais aussi de la poésie visuelle hors de ses gonds.

L’artiste "confond" dans un même ensemble la coquetterie d’une femme et parfois sa piété (les deux n’étant pas incompatibles) et des présences primesautières.
La juxtaposition et le choc créent une magie. Elle ne cherche pas forcément à résoudre des contradictions mais à les accentuer.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

 

Arnaud Cohen, Livre, Derrière la salle de bains, Coll. "Pickpocket", 5,00 € ; Maison Dagoit, Rouen.
Voir le site de l’artiste.

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