Accorder un lapin au réel – Valérie Favre

 

 

 

Chez Valérie Favre une certaine absence de vue est programmée afin de créer  une errance nécessaire. Ce qui est montré n'est  plus ce qu’on voit souvent à travers les images : la trahison par le mensonge de l'exhibition de seuls temps forts. L’artiste se refuse à expulser le "temps mort". Elle insiste même sur ce seul temps comme elle insiste sur le paysage uniquement lorsque l’ombre l’envahit. A « l’image-mouvement » de Deleuze répond ici l’image « louvoiement » qui, donnant un lapin au contextuel lui accorde une signification pleine par son "vide" apparent.

 

Une émotion nouvelle surgit là où il n'y a que dissolution mais en même temps mise en scène de l’ombre  (colorée dans la peinture). Valérie Favre pratique un geste essentiel au moment où de partout (et de nulle part) le monde nous submerge d’images. Avec la Suissesse dans le miroir vidéographique ou pictural il n'existe pas d'image de soi car l’image (fût elle d’éros) ne va plus d’elle-même. Le spectateur est  à la fois isolé et fasciné au sein d'une présence en creux où il n'y a plus d'individualisation mais seulement une évocation de désintégration de l'être. En émerge son ombre mais aussi son aura dans lequel un féminisme implicite fait son chemin.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Valérie Favre : Galerie Barbara Thumm, Berlin, Galerie Peter Kilchmann, Zurich, Galerie Jocelyn Wolff, Paris.

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