«Toi, tu as
refusé la règle générale. Tu as laissé ton idole couché dans ton lit, pour qu’ils
ne comprennent pas que tu erres, dans la forêt grande, chasseur sans armes,
portant tes bottes blanches» dit Yiannis Ritsos dans un de ses poèmes
posthumes, en évoquant son héros, le bel évadé.
Fidèles
à cet esprit poétique, les figures humaines qui peuplent l’univers artistique d’Antonis
Tsakiris envahissent la toile justement pour s’en enfuir. C’est-à-dire pour
déclarer leur statut non négociable de l’évadé. Parfois solitaires parfois en groupes, elles n’y
sont présentes que physiquement pour affirmer leur absence mentale. Or l’évasion
même si elle est un acte latent chez le peintre grec, elle reste toujours un
fait indubitable, fort spirituel et purement symbolique.
Protagonistes
absolus qui surgissent sur le canevas d’une explosion chromatique, les héros de
Tsakiris sont en première vue, des hommes contemporains, résidents dans un
environnement urbain, observateurs silencieux des événements de la vie quotidienne.
Mais sont-ils vraiment des êtres figés dans le temps et l’espace, muets et
immobiles à cause des conventions et des contraintes, emprisonnés à la réalité brute?
Les visages expressifs, les gestes parlantes, les regards fuyants témoignent de
manière fracassante justement le contraire et fonctionnent comme des symboles
éloquents d’un acte de révolte pas désiré, mais déjà accompli, d’une évasion. Les
hommes de Tsakiris sont surtout des rêveurs
survivants de la réalité, des fugitifs qui ne cessent jamais de s’interroger
sur l’énigme majeure de la vie, des êtres avides de liberté.
Domna Chanoumidou
Critique d’art
Antonis Tsakiris, Rue
des évadés, Librairie Hellenique-Galerie Desmos, 22 Janvier-10 Février
2016, 14 rue Vandamme, 75014, Paris.
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