Dorothée Wycart : le lyrisme à retardement



Par la photographie Dorothée Wycart cherche à se rapprocher le plus possible de l’essence des choses et de l’être. Le corps féminin se trouve plongé au milieu des éléments aquatiques, minéraux, végétaux pour suggérer une énergie vitale et une forme d’extase. La photographie reste  un "ut pictura poesis" mais sous un registre particulier : celui d'un paysage intérieur livré par la saisie du monde. L’œuvre est donc  une leçon de vie plus qu'une leçon de chose.

 

La photographe mêle le  rugueux au lissé, la surface à la profondeur en une rigueur impressionniste. Le disparate plus qu’esquissé signifie la revendication à l'émerveillement sans lequel la vie n'est qu'un suicide programmé. Puisque tout finit reste donc comme seul recours possible l'injonction de l'impératif "Viens" qui fracasse la tranquille continuité du discours  photographique.

 


Ni iconoclaste, ni conservatrice Dorothée Wycart est dans la lignée des essentialistes. Pour elle - plus que la solidité de la matérialité - le plein de l'affect permet de remplir l'existence afin que le dedans nourrisse le dehors et non l'inverse. La photographie n'a plus pour but la coagulation des fantasmes mais la métamorphose du monde par le pouvoir gigantesque de l'existence. Il convient donc d’entrer dans la nudité de l'œuvre.

 

Les prises sont moins des figures que des substances au sein d’une ascèse qui accepte l’éros selon une densité lyrique particulière puisque atonal. En effet l’image ne « chante » plus, elle fait mieux en sortant du magma pour l’assomption de l’être en une intimité de l'émotion. En ce sens le photographie devient enchantement mais paradoxalement dans son rapport le plus étroit, le plus "trivial" avec l’élémentaire qui seul fait la réelle vérité de l’être.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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