Stacy Kranitz face à la nuit

 

 

Chaque fois qu’il le peut Stacy Kranitz passe son temps dans la région des Appalaches pour photographier des communautés de « perdants » dans un travail qu’il décrit lui-même comme sans fin et donc qui ne peut s’achever. Parfois il apparaît  dans ses photos sans recherche d’esthétisme. 

L’appareil devient un outil pour saisir le réel sous forme de documents là où l’image saisit le mouvement dans sa fixité.  L’artiste quitte le main-street pour les franges où tout est proche du naufrage traversé d’un érotisme parfois impersonnel parfois dans lequel Kranitz est impliqué.

 

Le désordre du monde jaillit au moment où des êtres peu photographiés sortent de l’obscurité. Le réel de l’image devient l’image d’un réel où sous des états jugés larvaires apparaît une forme de beauté. Elle est faite de brisures, son « luxe » est altéré d’errances. L’œuvre pose les rapports qu’il s’agit de construire entre connaître et regarder. L’artiste y répond dans ses « images-sillages » (Bergson)  selon une  dérive  là où  la notion d’apparition prend un nouveau sens et une force paradoxale : celle de ne pas s’écarter du réel  et de ce qui n’empêche plus de le penser.

 

L’image se donne dans les démesures qu’elle transporte Elle interroge et reste à notre mesure dans le silence qu’elle casse. Il y a de l'émotion dans ses branches là où avant de s’envoler les phalènes restent cachées. Kranitz oblige à les regarder.

 

Jean-Paul Gavard-Perret

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