Larry Sultan
reste un photographe largement sous-évalué. Il est pourtant un des chefs de
file de la photographie postwar à la recherche des paradis artificiels du mode
de vie américaine saisi dans les faubourgs de Los Angeles. Peu ambitieux pour
sa carrière il s’est contenté pour vivre d’enseigner et de quelques photographies
dans les magazines ou livres collectifs. On le redécouvre peu à peu et les critiques
comprennent sa satire mélancolique et complexe.
Au-delà de
ses sujets classiques il a su suivre en incidence et au jour le jour des travailleurs
latino immigrés en soulignant leur statut ambigu. Un homme est sous un arbre,
un autre nettoie une piscine. Ils sont là comme en face de leurs employés pour
suggérer un double statut de dépendance.
Sa série la
plus célèbre reste « Pictures from Home » commencée en 1982 lorsqu’il
allait rendre visite à ses parents âgés dans la « réserve » pour vieillards que
constitue Palm Spring et son désert (d’ennui). Il a mixé ces photographies avec
celles de leur jeunesse à Brooklyn et a monté l’ensemble pour redonner un sens
à l’existence de son père et recréer son histoire. Ce fut aussi sa manière de
savoir qui il était.
Son autobiographie
se prolonge par “The Valley des artistes
de porn-movie en une scénographie théâtrale et documentaire. Le titre est tiré
du nom de la vallée où son père installa sa famille après guerre avant que ce
lieu devienne la capitale du cinéma porno en raison de sa proximité avec
Hollywood. Ces photographies sont plus belles que les films eux-mêmes.
Existe
toujours un équilibre entre aliénation et l’émotion qui fait de lui un Philip Roth photographique. Ses
images restent chastes et respectueuses de ses modèles en des compositions
aussi léchées que baroques. Il saisit les scènes même lorsqu’elles deviennent
intimes avec tendresse. Le photographe a exploré aussi des territoires plus
contextuels qui font de lui un pionnier du conceptualisme. Si bien qu’il resta
toujours autant à la recherche du cliché que de l’idée même de la photographie
de l’intime.
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