L’expérience esthétique d’Elisa
Migdaest autant existentielle quephotographique et rappelle la phrase de
Berkeleyau sujet des images :“Esse est percipi” (“être c’est être
perçu”).Cette phrase demeure capitale
pour comprendre le problème généré par une photographe qui précipite dans des abîmes. Cette
plongée abyssale est créée au moyen d'une série d’apparitions et de
disparitions.
Elisa Migda déblaie l’image et instruit
un procès de la représentation. Peu à peu tout s’achemine vers l’effacement et
l’extinction dansune matrice vidée de
matière : le modèle peut s’y installer pour se laisser bercer, tandis que
le spectateur contemple la scène en une sorte de voyeurisme
« déceptif ».Le modèle ignore
l’appareil qui saisit son corps parfois de manière frontale. La femme demeure
prostrée jusqu’à l’épuisementde l’image
qui se termine dans le spectre du
noir. Parfois elle a la tête dans les mains, pas encore véritablement affalée
ellesuggère un balancement qui se
meurt.
Demeurent desfragments
d’images des morceaux de lumière, des cheminements sans but ou des prostrations
d’épuisés. L’artiste devient proche de Beckett lorsque dansson
"Aperçu général" de « Film » il précise son propos :"le perçu de soi soustrait à toute
perception étrangère, divine, humaine. La recherche du non-être par suppression
de toute perception étrangère". La photographe suggère un mouvement de régression vers un lieu
primitif. Un lieu d'avant les images. Un lieu d'avant la vie. Un lieu où
tout a fini au moment de commencer.
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