Halinka Mondselewski : lieux connus, inconnus, reconnus
Halinka Mondselewski, Œuvres récentes, 11 janvier-14 février 2014, Galerie LigneTreize, Genève (Carouge)
Halinka Mondselewski permet de donner à voir une vérité qui n'est pas d'apparence mais d'incorporation très particulière. L’artiste par son minimalisme abstrait plonge dans l'opacité révélée d'un règne énigmatique, intense et douloureux. Sa peinture est un lieu du lieu, une étrange surface agissante où tout passe mais où rien ne se passe pas si ce n’est le pouvoir de la peinture en tant que langage. Il devient la présence du destin là où par l’abstraction la peinture est l’extériorité confondante qui renvoie à une intériorité du même type.
Il ne s'agit pas de disparition mais de création. Les toiles-fragments deviennent des actes d'amour envers les vivants. Celles qui sont réunies à la Galerie LigneTreize nous rappellent que nous faisons - encore - partie d’une communauté très simple, trop simple. Mais elles sont aussi un défi contre le temps, contre la mort non au nom d’une éternité mais d’une impermanence où le noyau de l'être est insubmersible.
Halinka Mondselewski prenant sa distance avec la peinture ornementale "envisage" et se "dévisage". De chaque toile émerge un profil particulier au temps. Au lieu d'insister sur les déliquescences qu’il porte en lui le l'artiste retrouve des schèmes élémentaires de diverses histoires d'affects qu’elle se refuse à diluer dans le pathos. Il y a là une expérience très perturbante et existentielle. L'artiste par sa quête dresse pour reprendre les vers de Celan
« L’écluse
Sur tout ce deuil
qui est le mien ».
Le chant des images en transgresse le non-dit. Des ombres se mettent à revivre, déambulent. Elles portent en elle Primo Lévy, Walter Benjamin et de nombreux inconnus. Chacun est libre d’interpréter, de refaire le récit de telles images sourdes et de leur grand besoin d'amour.
Jean-Paul Gavard-Perret
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