Chantal Fontvielle : impacts

Dans une forme d’abstraction Chantal Fontvieille crée une immense métaphore du monde comme de la féminité et de la violence que celle-ci subit. La cible parcourt son œuvre et devient la forme récurrente et matricielle atteinte par les flèches qui font de la femme un nouveau Saint Sébastien. L’impact traité sous diverses matières (carton, béton, plomb, plexiglas, coton) et techniques (dessins, sculptures, installations) devient le symbole d’une existence privée des lumières espérées de l’amour terrestre. Et si comme Laure dans son  "Histoire d'une petite fille" Chantal Fontvieille rêve encore que "des yeux d'enfants percent la nuit"  l’artiste montre combien l’existence est habitée de noir. Si bien que la créatrice est contrainte de voir plus la nuit dans le jour que l’inverse.

 

D’aucuns trouvent sans doute ses exigences paroxysmiques en son besoin d'absolu.  Ils peuvent considérer la créatrice comme une « sainte » particulière. De ses œuvres surgissent une solitude, une forme de pénitence et d’ascèse dans des hybridations et des radicalités qui rappellent les recherches de Jasper Johns et Rauschenberg.  L’œuvre reste ouverte, offerte en un appel vers un absolu cosmique. L’artiste s’y assume, s’y livre dans les cibles impactées qui ne cicatrisent pas mais  « saignent » dans leur béance. De la pitoyable comédie humaine Chantal Fontvieille souligne subtilement le cynisme, la vulgarité, la pusillanimité. Se sentant altérée elle cherche une forme d’ouverture au sein même de la figuration qui ramène à la clôture. Dans chaque cible demeure un vertige angoissant puisqu’au sein du passage espéré rien n’est jamais  possible. La femme reste exposée à la violence : les évènements du monde (viols en Inde par exemple) ne font que la rappeler.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Chantal Fontivieille, « De pierre, de plomb et de papier », texte de Marie-Christine Grange, Jean-Pierre Huguet Editeur, Saint Julien Molin Molette.

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