Jean Anguera : de la carte au territoire

 Après avoir cherché longtemps au sol les lignes qui conduisent au centre de l'univers Jean Anguera poursuit selon des trajectoires plus verticales la lutte contre l'abîme ou le chaos. Ce travail d'un intellect tendu et d'une spiritualité affirmée crée un nouvel espace absolument optique.  Une tension apparaît qui échappe à un code symbolique ou aux conventions à la Kandinsky ("verticale-blanc-activité, horizontale noir-inertie", etc.). Anguera propose sa propre réorganisation : elle répond à un espace cartographié mais de manière à refonder un territoire. Face à ceux pour qui la ligne ou la masse délimitent des champs,  le créateur invente des espaces qui atteignent une puissance supérieure car tout échappe. Non seulement "on passe entre les choses" (Bacon) mais parfois on pénètre à l'intérieur des crânes.

 

En montant du sol à la structure l'œuvre compose un espace calme et mouvant, où intérieur et extérieur, dehors et dedans ne veulent plus rien dire. Et c'est là peut-être la plus grande découverte d'Anguera. Avec lui, l'art crée une conversion lente. L’œuvre remplace l'horizon et ses feintes par des verticalités. La forme est intériorisée au moment même où elle gicle de manière "physique". Elle dément l'ordre des choses mais aussi le chaos qu'elle organise pour lui donner un sens. Le travail propose donc quelque chose d'une éternité - sans doute relative - mais qui en dit plus long sur le temps  que tous  ces « gestes » ou supposés tels d'artistes qui ne conjuguent que des feintes.

 

J-P Gavard-Perret

 

Jean Anguera, Maison Elsa Triolet - Aragon, Saint Arnoult en Ynes, du 7 février au 25 mai 2015.

 

 

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