Jörge Immendorff entre Don Quichotte, Sancho Pança et Rossinante
Dans les œuvres d’Immendorff
l'absence elle-même est donnée comme présence absolue. Au détour de fictions ou
théâtres plastiques en fragmentations la séparation est éprouvée dans toute sa
rigueur (l'absolument séparé) mais permet de se retrouver dans la proximité à
travers un personnage clé : celui de l’artiste scénarisé en multiples épreuves
et fonctionnalités sous formes sinon épiques du moins picaresques. L’artiste
allemand nous fait des orphelins de l’image stable et formatée. Nous devons en
accepter l'errance. Même (ou surtout) si elle rend incertain à nous-mêmes comme
elle rend le créateur incertain à lui-même.
Chaque œuvre de l’artiste met en cause et en scène celui qui se tenant à lui-même ne tient donc à rien. En divers jeux d'écarts programmés la réalité éclate : elle n’est pas renvoyée par l’art à son simple fantasme. Celui-là inclut soudain une présence critique. Ne demeurent que les éléments diffractés du réel. A chaque image correspond un dégel. Il convient d'en tirer les conséquences et d'aller au bout de la vérité que chaque fragment fait toucher. La sentinelle de l’artiste fait le gué. Mais les nôtres disparaissent en des cheminements sans but, des buts sans chemin qui fascinent : initiés par Immendorff ils provoquent les germinations de l'étincelante énigme du monde et de l’existence.
Jean-Paul Gavard-Perret
Jörg Immendorff « Les théâtres de la peinture », Fondation Maeght, Exposition du 28 mars au 14 juin 2015.
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