Sophie Larondee : rire, éros, épouvante

 

Sophie Laronde garde encore ses rêves de gosse mais ils se sont forcément un peu alourdis. A partir de ce terreau l’artiste aime faire peur ou rire. Elle cultive un jusqu'au-boutisme qui n’a rien d'inconscient. Elle voit le monde, le ressent plus qu’elle ne le fantasme. Riche humainement et, comme chacun, de névroses, elle les transforme en aspérités qui  rendent les œuvres touchantes et vivantes. Sous l’angoisse perdurent l'amour, ses champs de possibles et d’impossibles.  L’artiste joue avec la nudité mais sans jamais s’en moquer, bien au contraire. Elle « l’utilise »  telle qu’elle est. Au besoin elle exhibe non seulement qu’elle est : une viande à fantasme. Toutefois cette chair se nourrit elle-même de l’autre selon une anthropophagie prête à tout gober.

L’artiste crée divers cérémoniaux (parfois inquiétants) en instruisant des liens entre l’imaginaire et le réel. Ses photographies ramènent toujours à la sidération.  Pasolini n’est pas loin, Mais chez elle, l’image fixe recompose le mouvement. L’éros devient un cosmos optique : il fait son marché de tout. Les femmes ne sont en rien des  « roses pourpres du Caire » embarrassées de la lumière de lumignons. La fête reste souvent une monstruosité aux délices exacerbés. Certains dessins sont d’une violence tourmentée. Ils intriguent par leur envergure et leur profondeur en  un faisceau énergétique quasi magique producteur de ravissement ou de  terreur. Mais toujours en un recueillement. Existent des visions brutes, primitives, déséquilibrées et vives. Existent un monde terrestre et des aiguilles pour recoudre les chairs vives. Tout est kitch, joyeux, affreux, incisif et intelligent. L’art revient à trouver un puzzle de frayeurs et d'extases compatibles avec celles du regardeur. C’est courageux.

Jean-Paul Gavard-Perret

Atelier de la Poissonnerie, Chateauroux, 19  mai - 29 juin 2017.

 

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