Showcaller est le premier livre sur le travail de l'artiste plus qu'émergeante Talia Chetrit. Ses œuvres créées entre 1994 et 2018 sont rassemblées ici. Elles font écho à sa première retrospective au Kölnischer Kunstverein.
The titre Showcaller est un terme de théâtre choisi pour faire référence aux performances de la créatrice. Depuis toujours dans ces scénographies captées elle cherche à créer une dynamique à la fois entre la photographie et son modèle, entre la photographie et celles ou ceux qui la regardent.

Les premières œuvres réalisées lorsque l'artiste était encore teenager montrent ce qui allait devenir plus évident dans la vingtaine d'années qui suivent. Tout s'y mélange entre des "genres" tels que portraits de famille, ceux d'amis,  images intimes et sexuelles, photographies de rues, etc. L'artiste recherche toujours à donner à ses images et par la technique de prise de vue un aspect à la fois conceptuel et social.

Dans ce but Talit Chetrit désire toujours contrôler ses images afin de montrer comment tout peut être manipulé pour le sujet photographié comme pour le voyeur. L'œuvre se veut à ce titre une survivance de ce qu'un regard peut faire. Et ce jusqu'à laisser voir le trou de l'âme ou son mirage à travers les 23 grammes de son poids (si l'on en croit un cinéaste). Restent des courbes, des lignes, leurs chutes et leurs remontées dont la créatrice précipite le mouvement.

Il y a là les cambrures en embrouilles du visible. Et lorsqu’il fait froid, il suffit de s’enfoncer en de telles images pour croire se sentir au chaud. Preuve que l’image est une chose. Le voyeur y obéit à ce qu'il attend plus qu'à ce qu'il voit. Dessous c'est la terre que l'artiste efface plus ou moins et dessus la lumière. Elle recouvre parfois le corps de vasière jusqu'à ce que celui-ci se redresse et que réponde de rien. Voila le privilège de l’art, le vrai : pas d'échappée, ni d’avant, ni d’après.

Jean-Paul Gavard-Perret

Talia Chetrit, Showcaller, Mack Books, Londres, 2019