Les derniers impressionnistes au cœur de l’intimité

Dès le 15 décembre la folie sécuritaire du gouvernement va s’apaiser et nous pourrons de nouveau aller au cinéma ou entrer dans un musée, l’occasion de nous rendre à Lodève pour admirer les œuvres des derniers impressionnistes (jusqu'au 28 février 2021) qui s’aventurèrent au plus près de l’émotion, dans la contemplation naturelle de paysages ou la matérialisation intime d’un désir ressenti à la vue d’une jeune femme dénudée.
Quelle grâce ainsi révélée par la magie de quelques petits coups de pinceaux, on ressent d’ailleurs chez certains la tentation du pointillisme tant les touches successives de couleur sont simples, fines, répétitives et enchâssent le modèle dans un concert de lumière. C’est tendre, souple, fondant dans une indécision des formes reprises par le peintre, c’est nuageux – presqu’un sfumato – mais cela reste sobre, beau. On apprécie l’architecture si puissamment établie sous des ciels aux couleurs invraisemblables parsemés de nuages aux formes extravagantes.

C’est la première fois qu’une telle rétrospective est consacrée au courant intimiste de la Belle Époque – et ce très bel ouvrage au millier de reproductions de très grande qualité est digne de l’événement – célébrant la Société nouvelle de peintres et de sculpteurs. Cette confrérie d’artistes a été la plus célèbre et la plus caractéristique de son temps ; elle organisait à chaque début de printemps, dans la fameuse salle de la galerie Georges Petit, une exposition qui voyait le tout-Paris se déplacer…
La Société nouvelle tint la dragée haute pendant près d’un demi-siècle au courant moderne qui dévorait le milieu culturel et propulsa ses membres aux premiers prix de toutes les expositions internationales. Si chacun d’entre eux avait son propre style, parfaitement identifiable, ils partageaient surtout une vision sentimentale de la nature : rendre les êtres et les paysages tels qu’on les perçoit : tragique ou mystérieux, mais jamais dans la caricature ou l’outrance, mais au plus près de la beauté qu’ils dégagent. C’est pour cela qu’on les qualifia d’intimistes – et les portraits de nus ajoutèrent à la légende.

L’intimiste a été le dernier courant majeur de l’histoire de l’art français à être dévoué à la nature ; les mouvements qui vont lui succéder s’en écarteront bien vite. C’est pourquoi à la fin de leur carrière, ces artistes furent regardés par les critiques comme les derniers impressionnistes…

 

Rodolphe

 

Yann Farinaux-Le Sidaner, Derniers impressionnistes – Le temps de l’intimité, 300 x 245, près de 1000 illustrations couleur, Musée de Lodève/Éditions Monelle Hayot, septembre 2020, 320 p.-, 39 €

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