Pour Brel, mourir n’est pas de mise

Il a en assez. Dernier tour de chant. Pas de rappel, juste les titres prévus. Bonsoir-bonsoir. Il s’en va sous la pluie… L’Emmerdeur est à peine en post-production qu’il fait ses valises. Il en a assez. En nous ne sommes qu’en 1974. Mais il doit partir. Il prend la mer.

Curieux voyage vers le Pacifique qui s’interrompt une première fois aux Açores. Retour sur le continent. Opération pulmonaire. Cancer en vue… Brel n’en a cure. Il repartira. Convalescence au Hilton, à Bruxelles, puis retour à bord de l’Askoy. Traversée de l’Atlantique, pause au Venezuela puis passage du canal du Panama. Et plongée dans l’immense Pacifique. Trou d’air, et les jours sans vent qui s’éternisent. Le temps se fige. Quand soudain : les Marquises pointent au ras de l’horizon.
Atuona ville paradisiaque puisque personne ne le connaît ? Sans doute…

Après quelques temps, l’appel de la terre ferme s’impose. Vente du bateau, installation dans un bungalow. Achat d’un avion pour relier Papette et s’offrir des grandes ballades. Brel s’improvise courrier au long court. Il offre ses services et transporte passagers et fret à l’occasion…
Il fera aussi découvrir aux Marquisiens le cinéma. Leur dédiera une chanson. Car à force de ne rien faire il travailla beaucoup, comme tout oisif qui se respecte, finalement. Et grand nombre de ses plus célèbres succès (Orly, L’amour est mort, Les Remparts de Varsovie, Jaurès, Le lion, Voir un ami pleurer, etc.) furent écrits sur l’île. D’ailleurs il rallia d’un coup de Concorde Paris pour les enregistrer, en 1977.

En de courts chapitres habillement ficelés, David Hennebelle, dont c’est le premier roman, parvient à l’essentiel. Nous donner à voir l’invisible. Cette transition vers l’absolu. Cette quête d’un homme brisé qui alla renaître sous d’autres cieux. L’importance de l’amitié. L’amour de la cuisine. Le sens des autres. L’appétit pour la vie.

Annabelle Hautecontre

David Hennebelle, Mourir n’est pas de mise, Autrement, août 2018, 148 p. – 15 €
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