Chez eux de Carole Zalberg : Enfance en suspens

Grâce à un pasteur, Anna Wajimsky est cachée dans une famille de paysans. Ses parents, des juifs polonais se sont fait arrêter par les Allemands. Nous sommes en 1944 et dans les fermes de Haute-Loire, prés du Chambon sur Lignon, la vie est rude. Il y a les vaches à soigner, qui passent avant les humains, l’eau à aller chercher, le froid et le pain rassis au petit déjeuner. Il y a surtout la peur, enveloppante, qui étouffe la petite fille et le manque d’Ethel, sa maman.

 

Heureusement, dans cet univers étrange et étranger brille une lumière, celle de Mlle Tournon, institutrice de son métier qui a deviné les affres de la fillette. L’adulte la réconforte comme elle peut et la pousse à continuer ses études, malgré le danger. Une enfance entre parenthèses, une enfance en suspens où Anna va quand même puiser des forces, grandir, devenir autonome. À l’heure de la Libération, le bilan sera effroyable, tant de membres de la famille disparus, effacés, réduits en cendres.

 

Carole Zalberg à qui l’on doit le très beau Feu pour Feu (Prix Littérature-Monde) l’an dernier revient ici sur un épisode de la vie de sa mère avec un ton toujours aussi juste, empreint de sensibilité et dénué de tout effet de manches ou de pathos. On sort de ces pages troublée et pleine d’admiration pour les Justes qui en France cachèrent au prix de leurs vies des milliers d’enfants comme Anna.

 

Ariane Bois

 

Carole Zalberg, Chez eux, Actes Sud Babel, mars 2015, 96 pages, 6,70 €

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