Olga, Schlink & l’évidence

Faut-il systématiquement des contraires pour tisser des situations attirantes, mettre en opposition des cultures et des milieux sociaux pour provoquer l’étincelle ? Car à force de vouloir tirer le trait, on l’épaissit et même le plus virtuose des écrivains finira par s’enliser dans un maelstrom syntaxique et situationnel qui perdra le lecteur, soit par invraisemblance, soit par absence de plaisir littéraire, soit par lassitude d’attendre qu’il se passe autre chose que du convenu évident que l’on devine comme le nez au milieu du visage.

C’est dans ce piège qu’est tombé Bernhard Schlink qui n’aura pas su nous redonner les frissons du Liseur, non qu’Olga soit antipathique – ce serait plutôt Herbert, ce grand benêt qui croit qu’ailleurs c’est mieux, plus grand, plus beau – mais l’on voit tout de suite que leur histoire d’amour est impossible, qu’il y a un manque de volonté chez lui pour affronter la famille, car fuir n’est pas résoudre un problème. On compatit avec Olga qui, elle, affronte avec succès les bâtons qu’on lui met dans les jambes pour tenter de lui interdire sa promotion sociale au mérite ; mais elle ne flanche pas et obtient justice à force de travail et d’abnégation.

Viendra l’Histoire qui scellera l’impossibilité et un ultime voyage qui, dès le départ, s’annonce comme fatal à la vue de son impréparation due à la faiblesse de caractère de son entrepreneur, enclin à reporter le départ en jouant les conférenciers ici et là. On devine ensuite très vite à qui Olga raconte sa vie, ces lettres envoyées en poste restante au Groenland qui reviennent par miracle dans le concert des passions pour bien préciser – s’il en fallait encore – que ces deux-là s’aimaient d’amour fou, mais que la société n’en voulait pas ; ou que l’amant n’avait pas la poigne suffisante…

Porté par une langue accomplie et sans relief, ce roman poussif semble voué aux bibliothèques communales ou aux maisons de retraite, tant il faut avoir du temps à perdre pour accepter de se laisser ainsi promener dans un tourbillon d’espoirs douchés dès la moitié de l’ouvrage parcouru.

François Xavier

Bernhard Schlink, Olga, traduit de l’allemand par Bernard Lortholary, Gallimard, coll. Du monde entier, janvier 2019, 272 p. – 19 €
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