Le train d’Erligen de Boualem Sansal attendra

Tel Godot, le spectre d’un train libérateur plane sur le récit. Ombre malveillante, elle pousse à la confidence. La patriarche d’une riche famille s’épanche par voie épistolière. Tout en sachant que la poste n’est plus d’actualité. Comme ce train qui doit venir les secourir... et qui n'arrive pas.
Testament en forme de révélations, les feuillets iront dormir dans une cache. Le temps que. Le temps imparti pour que la lèpre soit vaincue. Car le pays est en ruine. Guerre civile ou folie collective ? Submersion migratoire ou inflation mafieuse ? Nul ne le sait. Sauf que le pays se meurt. Que l’État se défausse. Qu’il faudrait fuir…
Mais pour aller où ?

Ni roman à clé(s) ni conte contemporain, ce livre arrive trop tard. Car au-delà des prouesses littéraires – et donc techniques – le message est entendu. Qui n’a pas lu Le Camp des saints et/ou Le bûcher des vanités pourrait y découvrir quelque chose. Qui ne suit plus l’actualité depuis dix ans y apprendrait quelque chose. Sinon, quoi ? Que nous disent ces 256 pages que nous ne sachions déjà ? Que l’ennemi se nomme la Finance et l’Intégrisme islamique ?

Mais monsieur Sansal, s’il demeurait encore quelques naïfs en terre de France, depuis le 13 novembre 2015, ce n’est plus du tout le cas…
D’autant que cet attentat lie les deux maux ici dénoncés. Puisque les fuites des milieux autorisés les attribuent à la Turquie. Pour punir la France d’interférer dans son business syrien…
 
Livre à tiroirs donc. Aux attributs polémiques. Aux formes décousues. Bravoure littéraire qui rappelle que les loups sont entrés dans Paris. Que le consumérisme a vaincu la spiritualité. Que le cynisme est au pouvoir. Etc. Or, société du spectacle oblige. Qui s’en soucie ?
 
Annabelle Hautecontre
 
Boualem Sansal, Le train d’Erligen ou La métamorphose de Dieu, Gallimard, août 2018, 256 p. – 20 €

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