Charlotte Brontoë : rebondir

Charlotte Brontë après l’immense succès de Jane Eyre (1847) eut du mal à se retrouver moins par perte de veine romanesque, qu'eu égard aux impérities de la vie :  Branwell, Emily et Anne disparaissent en quelques mois et la laisse seule survivante de la fratrie d’écrivains.
Peu à peu l'auteure remonte la pente en deux romans Shirley (1849) et Villette (1853). Dans le premier sous fond de grève des ouvriers dans l'industrie textile deux héroïnes se disputent un prétendant. L'une et fougueuse et riche, l'autre plus timide et désargentée. L'auteure y incarne ses sœurs et y rameutent d'anciens personnages de ses romans de jeunesse.
Dans le second elle en appelle aux souvenirs  de son séjour à Bruxelles en 1842-1843. Elle transpose sa propre expérience dans le personnage de Lucy Snowe éprise d’un alter-égo peu agréable voir revêche. Et la romancière fait preuve ici de beaucoup d'humour caustique pour le dire et se fictionner sans condescendance.
Au sein de sa solitude nouvelle et douloureuse elle garde toute sa verve. Elle jette des ombres sur ce qui flamboie - l'inverse est vrai aussi. Le flux interne de la narration avance autant dans le réalisme que dans les codes du gothique que l'auteure semble embrasser pour mieux le détourner. Le tout là où parfois le cœur  gonfle jusqu'à se briser  mais où au sein des tempêtes de l'amour la romancière sait toujours preuve d'humour histoire de faire jouer ce qui déferle pour en freiner le cours.

Jean-Paul Gavard-Perret

Charlotte Brontë, Shirley - Villette (1849-1853), traduit de l'anglais par Véronique Béghain et Dominique Jean, édition publiée sous la direction de Dominique Jean, coll. Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, septembre 2022, 1392 p.-, 52€

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