Le crépuscule de la France d'en haut, le prophète du malheur français

                   

L’intellectuel à la mode

 

Depuis Fractures françaises, Christophe Guilluy a rejoint le cercle restreint des intellectuels à la mode et susceptibles d’influencer les politiques : comptons donc Emmanuel Todd et Marcel Gauchet comme ses compagnons d’infortune ! sa thèse est simple : la France est divisée non pas entre France d’en haut et France d’en bas, Paris et la Province mais entre Métropoles et France périurbaine. Cette dernière est peuplée des français de souche (plus connus comme « souchiens » d’après les indigènes de la République…), résidant dans le « périurbain » à la fois à cause des loyers exorbitants acquittés dans les centres-villes et en raison du white flight issu des banlieues, abandonnées aux immigrants. Dans Le crépuscule de la France d’en haut, Guilluy précise sa pensée et annonce en « prophète » la fin de l’ordre établi.

 

Un ouvrage passionnant

 

Christophe Guilluy est un de ces hommes qui interrogent l’intelligence de ces lecteurs, un peu comme Emmanuel Todd à sa grande époque. Il tente finalement d’expliquer pourquoi le pays, « ce cher et vieux pays » comme le disait de Gaulle, va si mal. Guilluy, via l’analyse de l’espace et du discours des représentations spatiales, démontre le divorce entre élites « mondialisées » et le peuple, ce grand inconnu rejeté du débat public et qui vote de moins en moins. Et, en bon géographe, Guilluy signale aussi au grand public que la distinction entre urbain et rural est de moins en moins pertinente pour comprendre notre société. Tout cela aide à nous faire comprendre où en est une France déboussolée par la mondialisation.

 

Les limites du raisonnement de Guilluy

 

Guilluy se veut aussi politique, d’inspiration chevènementiste. Il stigmatise avec une virulence acide l’instrumentalisation d’un discours antifasciste pour mobiliser les bobos et les classes avantagés par la mondialisation contre le FN et de culpabiliser l’électorat populaire tenté par le vote extrême. On sent que le discours de Terra Nova ne peut qu’hérisser le poil de notre géographe. Reste qu’il essentialise les bobos (exactement le reproche qu’on peut faire à Zemmour par rapport aux musulmans !) et qu’on a l’impression qu’il plaque un raisonnement idéologique créé ex nihilo sur une réalité observée… A lire en tout cas pour réfléchir.

 

Sylvain Bonnet,

 

Christophe Guilluy, Le crépuscule de la France d’en haut, Flammarion, août 2016, 272 pages, 16 €

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