L'acier trempé  de Julia Ducournau : Titane

 

Titane – à en croire sa réalisatrice elle-même (Julia Ducournau) – est un film imparfait. Mêlant les genres B (gore, horreur, serial killer), bancal entre ses deux parties, servi entre autres par un Lindon souvent impressionnant mais tout autant inaudible ( toutefois ce qu'il dit reste sans doute peu important) ce film est tout sauf raté. Moins insupportable de violence qu'on ne le dit il réserve des scènes de beauté plastiques exemplaires et qui font bouger les lignes.

C'est la preuve que le jury de Cannes réserve souvent des choix audacieux et inconfortables pour faire vivre le cinéma. Après une série de crimes inexpliqués, un père retrouve son fils disparu depuis dix ans.  Certains voient là "un ridicule film de bourgeois qui aiment davantage le néant pornographique que le cinéma".
De fait la réalisatrice après son premier film Grave, continue d'ébranler les films de genre qu'elle revisite et le cinématographe lui-même.

Laissant derrière elle les rhétoriques visuelles admises, en nouvelle trouvère la réalisatrice suit des voies torves et allume des feux souterrains. Le sexe lui-même perd de son amère splendeur.
Et le cinéma est infiltré par cette nouvelle augure qui révèle diverses inquiétudes.

Tout n'est certes pas porté à l'incandescence, il faut en quelque sorte trier dans ce qui est donné à voir dans une troublants obscurité faite pour que les vieilles métaphores se brisent dans la frange d'un concret inavouable. Le spectateur est contraint de sortir du bocal à poisson où on le fait tourner. Sur une lumière parfois éclatante, parfois glauque et cramoisie et à travers les personnages incarnés par Agathe Rousselle et Garance Marillier existe souvent une beauté sauvage là où bien des poncifs sont revisités.


Jean-Paul Gavard-Perret

Julia Ducournau, Titane, en salle actuellement.

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