L'Effrayant docteur Petiot, fou ou coupable ?

L'histoire de la criminalité place le Docteur Marcel Petiot dans la droite lignée de Landru et son infernale conception de la femme au foyer. Mais le cas Petiot est plus complexe parce qu'il pose la question de la responsabilité pénale et de la folie. Question d'une triste actualité, la responsabilité du criminel... 
Fou, alors, Petiot, qu'on accuse lors d'un procès mémorable d'avoir attiré dans son repaire de la rue Lesueur, à Paris, une trentaine de victime — dont la plupart des juifs à qui il "vend" un passage en zone Libre puis en Argentine —, tuées, découpées, brûlées à la chaux ou dans le fourneau. Ce sont d'ailleurs les fumées nauséabondes qui vont alerter les voisins, puis les pompiers et la police. Quelques mois à se cacher, et Petiot est repris, jugé, condamné à mort puis exécuté le 25 mai 1946. Sa défense : il aurait été un grand résistant et aux mains de la Gestapo pendant que les victimes connaissaient, dans "l'abattoir humain de la rue Lesueur",  leur funeste destin. 

Pour comprendre le cas Petiot, Claude Quétel reprend l'enquête à la source et balaie toutes les légendes, toutes les outrances de la presse à scandale et dresse le portrait d'un homme au destin incroyable, toujours entre légalité et folie, malgré ses mandats d'élu, sa carrière de médecin, sa famille... 

"On ne sait jamais si on est fou ou si on ne l'est pas. On ne peut être fou que par comparaison" (Marcel Petiot, lors de son procès)

L'enquête conduit à se demander si la folie de Petiot pouvait devenir meurtrière. Car sa folie est certaine, depuis sa plus tendre enfance agitée où se cumulent les renvois multiples, jusqu'aux derniers jours, dans sa prison, quand, au lieu de préparer sa défense il rédige un incroyable traité Le Hasard vaincu — un fatras de délires hétéroclites. Ses multiples vies, ses multiples pseudonymes, les zones d'ombres qui demeurent — le butin qui n'a jamais été retrouvé, son engagement à la libération de Paris, le nombre des victimes —, tout cela conduit Claude Quétel, dans un récit très fluide et passionnant, à s'interroger : "Il n'en subsiste pas moins qu'être médecin marron, mythomane et kleptomane, c'est une chose, et que se mettre à tuer, c'en est une autre, même si les circonstances de l'époque ont favorisé un tel passage à l'acte". 

Loïc Di Stefano

Claude Quétel, L'Effrayant docteur Petiot, fou ou coupable ?, Points, "crime", mars 2015, 2016 pages, 6,30 eur
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