Les feux noirs de Stéphane Martelly et Claudia Brutus

Aux  militants dont le pathos moral sert au bout du compte surtout à ne rien comprendre à quelque effort de vérité que ce soit répond le travail à deux de Stéphane Martelly et Claudia Brutus. Elles  restent toujours ouvertes à la question de savoir comment, après diverses enquêtes et recherches, se composent l’écrit et l'image, quelles formes il et elle inventent. Le tout pour proposer la forme juste d'un rapport à la vérité de l’expérience et la forme efficace de son impact.
Les deux créatrices savent que ne rien changer aux formes revient toujours accepter que les contenus restent d'une banalité crasse. C'est pourquoi elles désobéissent aux lois et ne sont plus des femmes bien alignées comme deux traits. Elles préfèrent  que le fil d’or et d’argent soient tordus et enchâssés pour retracer la lutte entre l’imagination vive des enfants et la violence d’institutions qui ne sont pas construites pour elles.

Claudia Brutus reprend dans son art premier un travail  de mémoire  contre les emprises et aliénations de cultures qui se croient supérieures. Et avec Stéphane Martelly elle en révèle les traits saillants. Sans elles nul laissé pour compte ne saurait avoir droit à la parole, à l'image. Dès lors les minables poètes et artistes petits-bourgeois en prennent implicitement pour leur grade. De fait les deux haïtiennes en exil prouvent que les tenants des consensus mous n’expriment que les sentiments de castes arriérées, des manies de vieux mondes coloniaux. Ils ne servent pas le peuple des oubliés.
Dès lors la poésie et l'art des créatrices ne sont plus des fééries gratuites,  des fantaisies ornementales, des spéculations ou fables romanesques "pour de rire". Surgissent les formations verbales et plastiques de mondes re-configurés et opposables au système fondé par des syntaxes cadavéreuse, le pragma des échanges quotidiens, l’idéologie volubile et impérative, la parole et l'image du pouvoir. Les deux créatrices n'oublient donc jamais leurs feux noirs de la nuit blanche pour marcher jusqu'au jour.

Jean-Paul Gavard-Perret

Stéphane Martelly & Claudia Brutus, Comme un trait et Le fil d’or et d’argent, Livre d’artiste, Montréal,  novembre 2022. 60 p., 30$ et/ou 30€

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