Billy Wilder, le retour de Billy the kid

Minuit, l’heure du cinéma

 

Patrick Brion est Monsieur Cinéma. Depuis des années, il anime « le Cinéma de minuit » tous les dimanches sur la troisième chaîne et permet au public cinéphile - et insomniaque - de découvrir classiques et raretés. Auteur d’ouvrages de référence, tant sur les genres du cinéma hollywoodien que sur des cinéastes (John Ford, Clint Eastwood), il propose ici un livre sur Billy Wilder, moins riche cependant en photographies que ne l’étaient d’autres ouvrages publiés par exemple aux éditions de la Martinière. Pour autant, Patrick Brion reprend sa méthode habituelle et décrit chaque film, ses conditions de production et de tournage, du premier (The major & the minor, 1942) au dernier (Buddy Buddy, 1981). Que reste-t-il donc de ces 40 ans de carrière ?

 

Un touche-à-tout

 

Quel drôle d’animal, ce Billy Wilder… Né  à Vienne en 1906, un temps danseur et gigolo, il débute sa carrière à Berlin en participant au film Menschen am Sontag de Robert Siodmak. Apprenti scénariste aux studios UFA, il quitte l’Allemagne lors de l’accession de Hitler au pouvoir. Après un passage en France, il émigre à Hollywood, apprend l’anglais en lisant des strips - méthode pas si idiote que ça -  et devient scénariste, travaillant notamment pour le grand Ernst Lubistch (Ninotchka) et Howard Hawks (Boule de feu). Wilder passe ensuite à la mise en scène et, après deux essais, signe un coup de maître, Assurance sur la mort, polar noir co-écrit avec Raymond Chandler et magnifiquement interprété par Fred McMurray, Barbara Stanwyck et Edward G. Robinson. Sa carrière est lancée, Wilder ne quittera plus le devant de la scène.

 

Comme la plupart des grands cinéastes hollywoodiens de l’âge classique, Wilder a touché à tous les genres, car le système des studios l’imposait. Film noir, comédie, aventures, notre auteur fut éclectique avec cependant une prédilection de plus en plus marquée pour la comédie (peut-être aussi avec la volonté de reprendre le flambeau de Lubitsch, son maître et père en cinéma). Or, s’il a signé d’incontestables réussites (Certains l’aiment chaud, La garçonnière), on peut cependant regretter que Billy Wilder n’ait pas persévéré dans une veine plus noire (dans le sillon d’Assurance sur la mort ou Boulevard du Crépuscule). Nombre de ses comédies (La grande combine, Embrasse-moi idiot) vieillissent mal (malgré la présence récurrente d’un Jack Lemmon toujours impeccable). Sept ans de réflexion, par exemple, souffre d’une certaine vulgarité, peut-être à force de trop refléter le conformisme et le refoulement sexuel dans lesquels étaient empêtrées les années 50.

 

De plus, comme scénariste, que ce soit pour Charles Brackett ou I.A.L. Diamond, Wilder privilégie les dialogues et succombe souvent au travers du bon mot qui frappe, au détriment d’intrigues bien ficelées ou d’une mécanique comique que maîtrisait parfaitement Lubitsch. Car, contrairement à ce dernier, l’humour de ses films manque de naturel et de spontanéité. Wilder a longtemps gardé une photo de Lubitsch dans son bureau : peut-être a-t-il souffert de cette référence constante au réalisateur de Ninotchka, qui l’avait tant influencé…

 

Un « guide » indispensable

 

Pour autant l’œuvre de Billy Wilder fait partie de tout passionné de cinéma. Pour ceux qui ne le connaissent pas, l’ouvrage de Brion est parfait. Chaque film fait l’objet d’une présentation synthétique, d’informations techniques (casting, directeur de la photo…). Brion n’offre pas une analyse aussi poussée que, par exemple, Tavernier et Coursodon dans leur dictionnaire 50 ans de cinéma américain (tel n’est pas son objectif) mais il donne à tout amateur le maximum d’informations avec un panorama de l’œuvre tout à fait satisfaisant. Cinéphiles, ce livre est pour vous ! Néophytes, cet ouvrage vous séduira tout autant !

 

Sylvain Bonnet

 

Patrick Brion, Billy Wilder, CNRS Editions, novembre 2012, 240 pages, 20 €

5 commentaires

7 ans de réflexion, pas vulgaire... trop drôle pour cela ! 

Chacun ses avis, Myriam! Ce film me laisse personnellement froid, contrairement à certains l'aiment chaud que j'adore (je cite d'ailleurs la phrase de fin très souvent!).

et quelle est cette phrase de fin ?

Il faut voir le film pour bien comprendre. Mais disons que Jack Lemmon se fait passer pour une femme et qu'un vieux millionnaire tombe amoureux de lui. et quand il lui révèle tout, cela donne ça:
"- Mais tu ne comprends pas ! Je suis un homme.
- Et alors ? Personne n'est parfait."

Il y a la même chute dans Priscilla folle du désert, quand le vieux mécano Bod (Bill Hunter) tombe amoureux de Bernadette (Terence Stamp) et, comprenant qu'il est un transsexuel  assume sa passion parce qu'il n'a jamais aimé comme cela avant...

en effet, nobody's perfect