Daniel Dezeuze : ce qui ne se voit pas

Dans Eros Semi Cour­tois, l’amour et la pein­ture sont sans cesse iro­ni­sés. Le créa­teur découvre ce qui est cou­vert et couvre ce qui habi­tuel­le­ment est à nu. À la suite de ses Pein­tures qui perlent (Gale­rie Daniel Tem­plon), celles du livre débordent du cadre rigide de la page et de la névrose obses­sion­nelle. Le créa­teur met l’accent sur un jeu de rec­tangles plus ou moins satu­rés. Tous avivent le regard. Celui-ci passe et repasse à tra­vers des pleins et des vides.
À coup de figures géo­mé­triques – agré­men­tées d’autres figures elles aussi géo­mé­triques mais plus colo­rées et plus petites qui viennent se dépo­ser comme des papillons sur la trame majeure – se per­çoit une sorte de degré zéro de l’amour : l’œil est saisi par des creux et des vides qui habitent les pages. Dans l’abstraction et ses déve­lop­pe­ments, la nature même de la pein­ture comme celle de l’amour se trans­forment en une extase par­ti­cu­lière arti­cu­lée sur ce qui pour­rait bien s’apparenter au néant du leurre.
Dezeuze tourne ainsi autour de l’énigme de la pré­sence de la pein­ture comme de l’amour afin de débou­cher sur la béance que para­doxa­le­ment la com­pa­cité clôt. Il ne laisse d’autre issue que le blo­cage des inter­stices d’un pos­sible. Lequel demeure par­fois sous forme de frêles indices. L’artiste depuis tou­jours aime main­te­nir ce type de sus­pens aigu, drôle et lan­ci­nant, gage d’espoirs mais de bien de doutes. Si bien qu’en bout de route une double ques­tion nous est retour­née : et vous que savez-vous de la pein­ture et de l’amour ?

jean-paul gavard-perret

Daniel Dezeuze, Eros Semi Cour­tois, Fata Mor­gana, 2012, 24 p. - 240€

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