L'héritière des anges - la littérature rose nouvelle génération

Lancée en 2013, la collection « Terres de femmes » des éditions De Borée fait partie de cette nouvelle vague de collections destinées aux femmes.  Il s’agit de présenter des héroïnes combatives et attachantes, fortes et fragiles à la fois dont les aventures prennent pied dans toutes les époques.  L’héritières des anges de Florence Roche colle parfaitement à la ligne éditoriale définie par les éditions De Borée.

           

            Début du XVIIIe siècle dans les Cévennes. Le jeune Eléonore  est élevée par Manille, le convers qui l’a recueillie alors qu’elle n’avait que cinq ans.  Sa vie est rythmée par les corvées qu’elle effectue pour l’abbaye des Pierres plantées et la forge de Manille. Bien que l’accès au monastère lui soit interdit en tant que femme, sa passion pour le chant la pousse à braver l’interdit. Découverte, Eléonore est enfermée dans un couvent, paradoxalement le seul endroit où il lui est permis de chanter. Remarquée par la pieuse comtesse de Lesle, la bienfaitrice du couvent, Eléonore devient sa chanteuse privée. Bien qu’elle ait tout pour être heureuse,  Eléonore souffre pourtant de ne rien savoir de ses origines en dehors de ce que lui a livré son père adoptif avant de mourir : sa voix, ce don qu’avaient aussi sa grand-mère et sa mère ainsi que toute sa famille depuis des générations, est à la fois un don mais aussi une malédiction qui a conduit tous les siens à leur perte. C’est en découvrant le secret de ses origines qu’Eléonore va réussir à s’affirmer pleinement.

 

            L’héritière des anges est effectivement un roman féminin qui s’inscrit dans la lignée de la littérature rose en ce qui concerne l’héroïne mais avec un fond historique assez intéressant : son héroïne, Eléonore, d’abord, va suivre un parcours initiatique la menant d’une abbaye cistercienne aux opéras de l’Italie florentine. On découvre une jeune fille fragile, chantant au milieu des près en attendant que son linge sèche  au cœur des Cévennes à une femme sûre d’elle interprétant le rôle d’Eurydice dans l’Orfeo de Monteverdi.  Un grand écart qui surprend un peu tellement il est radical.  La jeune Eléonore est assez mièvre et subit ce qui lui arrive avant de s’affirmer dans les cinquante dernières pages. Son parcours  est rythmé par des étapes assez classiques : la découverte d’un secret sur les origines, la contrainte pour tenter de l’en éloigner, la libération providentielle sous les traits de la comtesse, l’amour impossible avec sa rencontre avec le fils de sa bienfaitrice et le secret révélé au fur et à mesure de l’histoire avec un final plus ou moins surprenant. Alors certes, Eléonore s’émancipe mais ce n’est pas sans mal. L’intérêt de l’héritière des anges vient surtout du contexte historique : la Guerre des Cévennes ou Guerre des Camisards.  Conséquence directe de la révocation de l’Edit de Nantes, cette révolte a éclaté en 1702 et fait suite aux arrestations, condamnations et persécutions exercées à l’encontre des protestants et des faux convertis. Elle débute par le meurtre de l’abbé du Chayla, grand vicaire de l’évêque de Mende et inspecteur des missions, qui s’était rendu odieux aux populations par ses abus de pouvoirs. La répression fut sans pitié mais ne donna pourtant pas les résultats escomptés. L’histoire de Noélie et Laudine Larmoso et donc d’Eléonore s’inscrit dans cet épisode passionnant mais peu connu.

            L’héritière des anges fait donc partie de la littérature rose nouvelle génération, une littérature qui a pour ambition de donner des héroïnes plus percutantes et des histoires mieux construites à ces lectrices. Le pari n’est pas totalement rempli ici même si l’on saluera le travail historique de l’auteur, Florence Roche, professeur d’histoire- géographie.

 

Julie Lecanu

 

 Florence Roche, L’héritière des anges, collection «  Terres de femmes » aux éditions de Borée, septembre 2013, 317 pages, 21 euros. 

 

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