Jack l'éventreur démasqué

Jack l'éventreur ! le sujet est source de tant de livres et de supputations que la publication tonitruante du livre de Russell Edwards, Jack l'éventreur démasqué, nous contraint à être circonspect. D'autant que c'était déjà le titre de la belle enquête de Sophie Herfort (Point Seuil, 2008) qui accusait le chef du département d'enquêtes criminelles de Scotland Yard, Melville Macnaghten. Alors encore un nouveau livre ? Son présupposé est différent : il part d'un élément factuel pour remonter jusqu'à l'identité du criminel, et ne cherche pas à déduire son identité d'un faisceau d'éléments. L'élément factuel : le châle retrouvé près d'une des victime de Jack L'Eventreur, sur lequel plusieurs traces de sang figurent, celui de la victime, mais aussi peut-être celui de son meurtrier. 

L'enquête va durer sept ans, pour parvenir à identifier Aaron Kosminski, un barbier fraîchement émigré de Pologne, et qui était déjà considéré comme l’un des principaux suspects. Acheté lors d'une vente aux enchères, ce châle devra d'abord être identifié comme étant vraiment celui retrouvé près de Catherine Eddowes, quatrième et dernière victime de Jack l'Eventreur. Ceci fait, c'est l'ADN qui va parler !

Le livre en lui-même est l'histoire de l'enquêteur, de sa passion pour cette histoire hors normes, de sa découverture du châle et de toutes les étapes de son enquête, des sciences qu'il mobilise pour atteindre à sa vérité : l'ADN mitochondrial propre à une famille, et identifié en comparant avec celui d'une descendante de la victime. Isolé, cet ADN permet de confirmer l'identification du châle, pris sur le lieu du crime par un policier pour l'offrir à sa femme, et qui jusqu'alors était demeuré dans les archives de Scotland Yard. Une autre trace résiduelle (du sperme ?) ayant été retrouvée sur le châle, et c'est encore l'ADN mitochondrial d'un descendant d'Aaron Kosminski qui conforte Russell Edwards dans son hypothèse. 

Aussi séduisante qu'elle est présentée, cette hypothèse ne pourra pas être confirmée. L'ADN mitochondrial ne permettant que des rapprochements et jamais une certitude définitive, surtout 120 ans après les faits. D'autant que le récit en lui-même est surtout centré sur l'auteur et ses découvertes. Il faudra sans doute attendre l'intervention d'une équipe scientifique indépendante pour accréditer définitivement la thèse d'Edwards, ou lui attribuer un pourcentage de crédibilité. 

Quoi qu'il en soit, c'est une hypothèse passionnante et un récit prenant qui nous plonge une nouvelle fois dans les ruelles sombres de Whitechapel.


Loïc Di Stefano

Russell Edwards, Jack l'éventreur démasqué, traduit de l'anglais par Daniel Lemoine, préface de maître Emmanuel Pierrat, L'Archipel, janvier 2016, 286 pages, 21 eur
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