Je ne vis que pour toi

Valentine, vient d’épouser Antoine. Un homme qui a vingt ans de plus qu’elle, mais qui le jour de leur rencontre lui  a affirmé que Marcel Proust était son ami. Une confidence suffisante pour que la jeune fille qui lit le Petit écho de la modeLes plaisirs et les jours et rêve surtout de quitter la Bretagne le suive à Paris. La perspective d’épouser un jeune médecin qui pue lalcool la rebute et précipite sa décision de partir avec un parisien cultivé qui lui ouvrirait les portes des salons de l’aristocratie.

Le mari volage qui l’installe dans un bel appartement n’a pas menti : il connaît du monde et la présente très vite à Colette. Elle rencontre également Natalie Clifford-Barney dont elle tombe amoureuse. Elle croise Apollinaire, Proust, Elizabeth de Gramont, Anna de Noailles, Robert de Montesquiou, toute la fine fleur de l’entre deux guerres.
Les De Dion-Bouton filent à quarante kilomètres à l’heure, les jupes et les cheveux raccourcissent : c’est dans ce contexte à la fois libre et encore très contraint,  que la jeune femme va faire son éducation sentimentale et sexuelle. Très éprise de Natalie Barney, à  la fois amie, amante, sœur et mère, elle vit une passion très mouvementée. Son mari n’apprécie pas que sa femme soit devenue si vite une parisienne et que pire, ait commencé à écrire. Il lui lance un jour : quil se sent de trop dans cette famille !

Emmanuelle de Boysson évoque la Belle époque avec brio, son héroïne devenue écrivain assiste à la remise du prix Goncourt à Marcel Proust sous un tonnerre de protestations : le prix aurait du revenir à Dorgelès, un vrai poilu ! Se rend à une réception chez Shakespeare and Co en l’honneur de James Joyce, est présente à une présentation chez Paul Poiret et publie son livre. La petite bretonne a  en apparence réalisé ses rêves les plus fous.

À la fois sensuel et sensible,  le dixième roman de l’auteur, de Je ne vis que pour toi est un magnifique hommage à cette période où les femmes prenaient la liberté  toute nouvelle d’aimer et de créer.

Brigit Bontour


Emmanuelle de Boysson, Je ne vis que pour toi, Calmann-Lévy, août 2020, 261p., 17,90 euros

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