Sortie honorable ou déni de vérité ?

Débuté à 18h30, achevé à 22h30, voilà un récit truculent que l’on ne parvient pas à laisser en plan, même quand la faim vous tenaille. Éric Vuillard recouvre ici la verve insolente et l’humour piquant qui avait fait tout le charme de 14 juillet, avec cette finesse d’analyse et cette logique implacable qui nous met en face de nous-mêmes, voire de notre société si policée, si hypocrite, que les mufles vont hurler à la fake news, anglicisme branchée pour évoquer une fausse information, faire planer le doute, or tout est vrai comme dirait l’autre, et je me suis amusé à voir les Castries épinglés, notamment un ancien pédégé d’Axa (marié à sa cousine, ah que ne fait-on pas pour préserver la fortune) dont un cousin me narra quelques croustillants secrets de famille et l’engagement pieux du sieur en question, d’où mon agacement à le voir aller à l’église tous les matins pour ensuite cracher sur Droit au logement qui demandait la mise à disposition de milliers de mètres carrés inoccupés pour loger des sans-abris, mais monsieur de Castries n’en avait cure puisque d’abord comptait le bilan et non l’humanité… L'hypocrisie de la religion dans toute sa splendeur. Dire qu'il aurait été le Premier ministre de François Fillon s'il avait été élu, ça fait froid dans le dos...

Aussi, nous suggérerons de glisser ce livre sur la table de chevet de l’Emmerdeur afin qu’il sache que l’on sait, donc qu’il arrête de nous prendre pour des simplets en racontant tout et son contraire au fil de l’eau, car même si ces jours sont comptés, les nôtres deviennent franchement invivables ! Il suffit de ces pantouflards de la REM qui n’ont rien à envier aux guignols des années 1950 qui étaient des pantins qui agissaient en moutons dès le petit couplet servi par l’orateur important qui joue son rôle de clochette. Il permet de ressouder instantanément les membres de la grande coalition. À son signal, on exige des autres une totale adhésion, autrement dit, tout ceux qui prétendent pouvoir participer aux décisions, […] doivent, […] par leur approbation sans équivoque, montrer […] qu’ils consentent à se censurer. Ils doivent montrer qu’un nom de valeurs prétendument honorables, comme le patriotisme, dissimulant d’autres intérêts non écrits, mais qui sont cependant un préambule implicite à toutes les constitutions, faces aux insinuations désagréables […] les députés doivent mettre leurs divergences en sourdine.

Ici il est question de la guerre d’Indochine qui vidait les caisses à compter d'un milliard par jour (le Quoi qu'il en coûte de l'époque, déjà, mais un argent qui n'était pas perdu pour tout le monde ; quant aux milliers de morts, quelle importance ?!). En ce moment c’est la guerre contre la Covid, mais n’y voyez-vous pas une certaine ressemblance ?
Éric Vuillard poursuit son enquête avec l’analyse du conseil d’administration de la banque d’Indochine, ses prises de participations ici et là ; encore un parallèle avec aujourd’hui dès lors que l’on se penche sur l’actionnariat de Pfizer (un certain fonds d’investissement, lequel avait déjà joué un rôle dans un audit retentissant de la Sécurité sociale, commandité par E. M., qui avait ému quelques parlementaires) et l’oukase interdisant d’administrer un traitement contre la Covid pour n’imposer que le tout vaccin. Il n’y aura pas de sortie honorable tant que le mépris sera de mise pour justifier le gonflement des bénéfices de Big Pharma.

Face au déni, l’Indochine se révolte, les pouvoirs publics se dérobent, le général Navarre se saborde en inventant de toute pièce le piège de Diên Biên Phu et le secrétaire d’État américain ne trouve rien de mieux que… de nous offrir deux bombes atomiques (sic) : il faut dire que la CIA de l’époque n’en est plus à une monstruosité (Guatemala, Congo, etc.) si bien que la France laissera la place pour que vingt-cinq ans plus tard Saigon tombe sous les caméras du monde entier, avec les fameuses images d’évacuation héliportée via les toits de l’ambassade… Entre-temps, certains se sont bien remplis les poches.

Salutaire, poignant, cynique et malheureusement d’actualité mais diablement troussé, insolent à souhait et revigorant, ce récit s’empoigne comme le guidon d’une Harley pour bien faire ronfler le fameux moteur, et accélérer en droite ligne : oublier et fuir cette engeance pour les plaines désertées d’une nature à réhabiliter.

 

François Xavier

Éric Vuillard, Une sortie honorable, coll. Un endroit où aller, Actes Sud, janvier 2022, 204 p.-, 18,50 €

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