Pieter de Reuse : Dotremont le lisible et l'illisible
L’auteur insiste (entre autres) sur un point capital : le logogramme n’est pas une calligraphie mais bien une écriture. Dotremont voulut même un temps – apprend de Reuse – les nommer "anti-calligraphies". En effet il existe dans le terme calligraphie la notion d’une beauté que l’artiste ne cherchait pas en première instance. Il s’est toujours refusé à suivre le sens de la tradition. Le logogramme diverge donc totalement du caractère religieux, mystique comme du caractère normatif et fonctionnel inhérents à la calligraphie.
Ni maître d’école ni métaphysicien Dotremont cherche "simplement" (ce qui n’est jamais facile) la défaillance d’une "lisibilité orthographique au profit d’une lisibilité plastique" (p. 65). Le changement est capital : il fait du créateur un irrégulier parmi les irréguliers de la langue dont la Belgique regorge. Par le logogramme l’artiste passe le langage au pilon de la voix en le mettant dans de beaux draps. Il se tord en offrant de paradoxales dentelles là où les mots de la tribu flottent soudain sous d’étranges bannières.
Jean-Paul Gavard-Perret
Pieter de Reuse, “Christian Dotremont – traces de logogus”, CFC Editions, Bruxelles, 2014, 184 pages,
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