Le gouvernement du désir, une nouvelle tyrannie?


 Un économiste iconoclaste

 

Économiste, proche à ses débuts de Raymond Barre et Marcel Gauchet, Hervé Juvin s’est notamment fait remarquer du public par des essais Le renversement du monde : politique de la crise et surtout Le mur de l’Ouest n’est pas tombé. Dans ce dernier ouvrage, il prend des positions très critiques vis-à-vis de l’hégémonie américaine en accusant Washington d’attendre avec impatience une guerre extérieure afin d’éviter de résoudre les dégâts intérieurs de la dernière crise financière. Dans Le gouvernement du désir, Juvin se penche sur la place accordée au désir dans nos sociétés occidentales. A priori, on est éloigné de ses travaux précédents… et en fait pas tant que ça.

 

Bandez, c’est un ordre !

 

Le gouvernement du désir brasse beaucoup d’idées à la mode : c’est un témoignage flagrant de la zeitgeist de notre triste époque. Hervé Juvin critique avec raison la place donnée à la satisfaction du moindre de nos désirs, en particulier sexuels. Il y identifie une mode venue des États-Unis (sa bête noire) et y voit un moyen sûr de gouverner les individus selon un mode libéral.  Il critique avec beaucoup d'acuité et d'exemples à l'appui le culte de la performance sexuelle.


Politique d'abord


De l’accomplissement de nos moindres désirs sexuels, au détriment de l’amour ou de toute autre « relation » humaine, Juvin saute ensuite de wagon et passe au désir matériel en général pour critiquer le « citoyen consommateur » actuel. C’est souvent juste, bien écrit mais peu original (d’autres avant lui critiqué cet aspect de nos sociétés) : on salue l’intellectuel acrobate, pertinent et parfois drôle. Et on dira avec le chanteur : all you need is love !

 

Comme d’autres, Hervé Juvin diagnostique le retour des nations en politique, le Brexit est passé par là. À lire en tout cas.

 

Sylvain Bonnet

 

Hervé Juvin, Le gouvernement du désir, Gallimard « le débat », novembre 2016, 288 pages, 22 €

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