Fabienne Jacob : éclosion

Il existe dans les romans de Fabienne Jacob un charme (voire bien plus) particulier. Les qualités de l'auteur sont avant tout littéraires : le roman emprunte un mouvement original  là où la puissance des évocations des choses les plus simples donne des contours particuliers à cette histoire où la narratrice qui dit ne pas plus croire eu temps qu'aux plis de l'être est obligée de composer avec.
Car l'enjeu est de taille. Suite à la disparition d'une de ses deux amies les plus chères, Helga la narratrice tente de se refaire une santé - à savoir une vie. Pour autant son récit n'a rien de pensum. Car cette héroïne a un regard et un humour des plus allègre et intelligent qui n,e cache pas combien se reconstruire n'est pas simple. Le passé (qui lui ne l'était pas reste  dans le tête de celle qui fut une des trois étudiantes d'un appartement communautaire surnommé le Campo.
Mais avec le départ d'une des trois jeunes femmes la parenthèse du lieu et de la jeunesse se referme. Hela, Rosie et Anders (venu dans l'appartement un peu plus tard doivent se lancer dans la vie adulte pour s'inventer leur vie. Cela prend du temps. La narratrice croit ne pas en manquer d'autant qu'il a du mal à avancer comme alpagué par qui elle fuit - et non seulement au Campo.

Celle qui aurait voulu passer sa vie entière à étudier les lettres, doit franchir le cap en espérant que se séparant du mobilier et de l'immobilier qui s'attachait à elle tout irait sinon mieux du moins bien.
Mais le chemin est long. Des petits boulots s'enchaînent. Puis un plus fixe qui laisse la narratrice perplexe. Mais elle avance même si – pense-t-elle – les employeurs qui misent sur elle parient sur un mauvais cheval. Pour autant la vie avance et peu à peu se défait un sentiment de culpabilité couturé à l'enfance.

Tout progresse avec une simplicité narrative là où pourtant les évolutions demeurent complexes. Mais c'est ce qui donne à ce beau roman un "goût" si particulier et envoûtant. Et ce jusqu'au bain final qui représente à un baptême que la narratrice s'offre sans rituel en se prêtant ou s'accordant à elle-même.


Jean-Paul Gavard-Perret

Fabienne Jacob, Ma meilleure amie, Buchet-Chastel, août 2021, 224 p.-, 17 €

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