Lionel Bourg : en longeant l'Achéron

Lionel Bourg sait l'écart qui sépare le chuchotis de la lune et les épiphanies des racines. C'est pourquoi au plus fort du silence et près du vide creusé plus tard pour nos abattis, son texte devient une belle dérive de certaines pensées noires :
Mes nuits sont monotones et ma pensée – ma pensée… le terme fera sourire –, se tourne avec l’insistance maladive des idées fixes du côté des morts, parents, amis, confrères
Et d'ajouter : si bien qu’au moment du sommeil je retiens assez laborieusement les larmes que je n’ai pas toujours su verser.
Il s'affiche donc comme le rescapé et le dernier avatar d’une fratrie muette, tout amour, toute tendresse n’ayant en fin de compte donné vie qu’à de pesantes mélancolies et des déchirements dont ne subsistent maintenant que les cicatrices.
Pour autant ces reliquats ne sont pas superfétatoires. Et face aux défunts il réanime des présences de manière incongrue voire facétieuse.
De tels fantômes sont convoqués dans un bal des maudits ou des anges sortis d'un célèbre film de Wim Wenders (Les ailes du désir), d'un tableau de Hopper ou d'une grotte du Périgord. Existent une dérive onirique et une méditation pleines d'humour là où dans L’ombre lente du temps la poésie suit son cours et imagine encore là où tout à la fois se maquille et brille.
Jean-Paul Gavard-Perret
Lionel Bourg, Où se perdent nos pas, illustrations d’Olivier Jung, Fata Morgana, avril 2021, 48 p.-, 12 €
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