Christian Dotremont et le grand feu noir de l'amour

Se comprend à lire ces lettrés d'amour enflammées du jeune Dotremont juste arrivé à Paris et amoureux éperdu de la poétesse Régine Raufast, que le surréalisme "parisien" n'est rien par rapport au surréalisme belge.
Et si Breton se fit le chantre théorique de L'amour fou, Dotremont le met en acter sans jamais s'essouffler en ces lettres incandescentes qui se moquent des doxas.
L'auteur est plus intéressé par sa muse que par lui-même. Par elle il guette l’éclosion des miracles, l’ascension des merveilles. Autant dans sa correspondance que dans le poème La reine des murs écrit en 1942 et dont les lithographies de Pierre Alechinsky, reproduites ici, accompagneront la publication vingt ans plus tard à la Galerie de France.
Ici l’action poétique et l'action amoureuse se confondent dans un exercice patient et délibéré aussi existentiel que poétique. Existe un effort aussi savant que pulsionnel pour inventer une forme originale en composant un territoire où l’absolu de l'amour jaillit dans le dérèglement rationnel qu’il impose.

Jean-Paul Gavard-Perret

Christian Dotremont, La reine des murs, illustrations de Pierre Alechinsky, postface de Stéphane Massonet, Fata Morgana, octobre 2022, 80 p., 15€

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