Un personnage iconique

Ah, le Poulpe ! Détective justicier et anarchiste créé à l’origine par Jean-Bernard Pouy aux éditions Baleine comme une tentative de redonner vie à une littérature feuilletonnesque et populaire, le Poulpe  a été repris par la plupart des grands noms du polar (comme Serge Quadruppani ou Jean-Paul Jody qui a signé dans la série le très jouissif Vingt mille vieux sur les nerfs), des critiques (Noel Simsolo, Gérard Lefort) et même des écrivains de science-fiction (comme Jean-Marc Ligny). Et force est de reconnaître que ça marche. Le principe de la série fonctionne ici à plein. Les volumes se suivent sans qu’il y ait forcément de lien entre les romans. Le Poulpe est un personnage invariant, une bible a été rédigée par Pouy et ses amis et chaque auteur se doit de respecter ces consignes. Pour le reste, il est complètement libre.

Ici ce sont Caryl Ferey (qui a connu un grand succès avec Zulu et Mapuche) et la musicienne Sophie Couronne qui s’attaquent au personnage. Leur thème : dopage et  drogue, déclinés dans le monde sportif et dans celui des boîtes de nuit.

Amour, vengeance et sportifs camés

Gabriel est hospitalisé, en train de soigner sa sciatique dans une clinique de remise en forme. Il écrit à sa compagne Cheryl, coiffeuse tapageuse, qui lui manque atrocement. La pauvre Cheryl a quant à elle été victime d’une nouvelle version de la drogue du violeur. Mais on ne s’attaque pas à Cheryl sans en subir les conséquences et elle décide de retrouver son violeur qui, de surcroit, a tué une de ses amies. Quant à Gabriel, sa clinique est juste à côté d’un centre d’entraînement pour sportifs de haut niveau. Un matin, il tombe sur un athlète nu en train de courir comme un dératé, avec les yeux exorbités d’un drogué, qui se jette dans un précipice… Gabriel décide évidemment d’enquêter. Les deux histoires finiront par se rejoindre.

D’amour et dope fraîche se lit vite et bien. Les deux auteurs ont livré une variation sympathique sur le personnage. La vengeance et la contestation des institutions établies, coupables de manipulations meurtrières, sont au cœur du livre et respectent la thématique du Poulpe. Rien de bien original en somme mais un livre efficace pour les fans du personnage, pour les lecteurs pressés (et nostalgiques de vieux séries noires), pour les amateurs de polars. Ça fait pas mal de monde, non ?

Sylvain Bonnet

Caryl Férey & Sophie Couronne, D’amour et dope fraîche, Gallimard folio policier, Janvier 2013, 176 pages, 5,95€