De Saint Augustin à Proust : voyage au centre de la Littérature

Il y aurait plus de mystère à lire qu’on ne pense. Si l’on en croit cette anthologie. Ce ne sont pas moins de cent textes qui confirment qu’il y a bien mille et une manières de lire. C’est-à-dire d’avoir un rapport avec l’objet-livre. Voire cette activité – qui n’est en rien oisive – de lecture (compulsive, concentrée, solitaire, ludique, etc.). Avec un rapport évident au corps du lecteur… En effet, le plaisir de lire est sensuel. Il n’y a pas que l’intellect qui joue un rôle. Ainsi ce livre aborde-t-il le sujet sur le plan de la lecture. Et de l’érotisme. Deux activités qui mettent en jeu le corps et l’imagination. À partir du modèle central du lecteur absorbé dans son livre, se décline un large éventail de postures de lecture. Cela va de la rêverie à la réflexion. De la méditation à la spiritualité.

On découvrira aussi que la lecture n’a pas toujours été une pratique solitaire. Bien avant de relever de l’ordre privé et de l’intime, la lecture s’est longtemps pratiquée à voix haute. L’oralité est d’ailleurs la mère de la poésie… Ainsi lisait-on de manière collective, dans les salons, les ruelles, les jardins…
Car la lecture est avant tout une rencontre. Entre un lecteur, un texte et son auteur. Entre plusieurs lecteurs qui confrontent leurs interprétations. La frontière entre l’écrit et l’oral s’estompe. La lecture vocalise le texte écrit et le prolonge par la conversation. Voire la relation amoureuse.

Les scènes de lecture ont également permis de légitimer un certain genre littéraire. Ce fameux roman. Décrié à ses débuts puis encensé de nos jours. Le lectorat s’élargit. L’élitisme qui avait accès à la littérature disparait. On passe ainsi d’une lecture sacrée à une lecture profane ! Et donc d’une lecture édifiante à une lecture dangereuse…Contre toute attente, ces deux pratiques se ressemblent, finalement. Bien des aspects sont communs : le savant comme la lectrice de romans à la rose sont avant tout… victimes de leur curiosité. La lecture est donc bénéfique – ou maléfique – selon l’usage que l’on fait des livres.

Cette anthologie nous rappelle que les scènes de lecture sont omniprésentes dans la littérature. Comme une mise en abyme du lecteur. De Don Quichotte à Madame Bovary, la lecture, on le sait, peut rendre fou !
Vous vous en rendrez compte par vous-même en dévorant ces textes connus ou rarissimes – français comme étrangers. C’est à une traversée extraordinaire que vous invite Aude Volpilhac. Voyage au centre de la Littérature sous l’angle d’une pratique qui, aujourd’hui, subit des mutations profondes. Ce livre témoigne d’une activité – la lecture – qui aura traversé les siècles en questionnant sans cesse notre rapport à la tradition et à l’altérité.

Annabelle Hautecontre

Aude Volpilhac, Scènes de lecture – De saint Augustin à Proust, avec un cahier hors-texte de 8 pages couleurs + 8 gravures en noir & blanc, Folio classique, novembre 2019, 528 p.-, 9 €

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