François-Henri Désérable ou L’usure du lecteur

François-Henri Désérable dont les deux premiers livres m’enchantèrent est ici, exécrable ! Et ce n’est pas que la pirouette de la rime qui impose ce mot, c’est un ensemble, une mode, une attitude. Depuis Molière – Mais qu’allait-il faire dans cette galère ?! – il semble que chercher les ennuis est une posture que certains s’amusent à prendre, quelqu’en soit la finitude. Après on pleurniche et on appelle au secours l’ambassade de France, puis le gouvernement pour tenter de nous sortir du merdier dans lequel on est allé se mettre sciemment. D’ailleurs, dès la première page, François-Henri Désérable s’en amuse, relatant l’appel téléphonique du Centre de crise du Quai d’Orsay qui l’incite à ne surtout pas aller en Iran. Mais rien n’arrête l’auteur, surtout pas quand on s’est juré de singer Nicolas Bouvier – jusqu’au titre de son récit – et quoi qu’il en coûte, jouons à notre petit BHL et allons dénoncer ces vilains islamistes… On aurait aimé un détour par les geôles iraniennes, au moins il y aurait eu un peu de piquant et puis on aurait pu en rire, de ce bobo plongé dans la cruelle réalité, parti faire le malin pour son seul orgueil...
Mais non, tout se passa bien alors voilà, outre enfoncer des portes ouvertes et nous dire ce que l’on sait déjà, la lecture pesante de ce livre n’apporte rien. Oui le peuple a peur, oui il faut résister – mais comment ? –, oui l’omerta est dangereuse – on aimerait alors l’entendre sur l’Ukraine dont le sujet est un cas d’école dans les fake news –, oui ces femmes sont admirables et courageuses… et après ? La République islamique est une kleptocratie doublée d’une thanatocratie donc un régime corrompu qui s’approprie les richesses d’un pays et se maintient au pouvoir en régnant par la mort et par la peur des mises à mort. Fantastique info ! Merci monsieur Désérabe d’avoir éclairé ma lanterne, sans vous je ne sais pas ce que je serai… Quelle moquerie ! Quel sens de l'analyse ! Sans parler de la forte propension aux gros mots qui transforment le récit : de grossier – parfois acceptable – il en devient vulgaire. Dans quel but ? Faire branché et attirer un jeune lectorat ? Mais on n’y apprend rien dans ce livre dont la seule question est : quel est l'éditeur assez sot pour avoir laissé faire? Ou alors c'est que l’ego de l’auteur devait être satisfait et que l'on n'est pas un homme sans avoir connu la petite peur quand les services de sécurité finirent par lui mettre la main dessus dans le Kurdistan lui intimant l’ordre de quitter le pays, ce qu’il fit. Certains auteurs ne devraient pas quitter Saint-Germain-des-Près, ils ne sont pas taillés pour.

François Xavier

François-Henri Désérable, L’usure du monde – Une traversée de l’Iran, Gallimard, mai 2023, 155 p.-, 16€
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