Quand  un live devient concept-album : Ray Charles à Newport

         

 


 

Si Dieu inventa d’abord le ciel pour y vivre tranquille, Ray Charles réinventa le blues pour l’inquiéter à travers une modernité inédite. Soudain le jazz classique bascule vers de R’n’B. Et si l’artiste respecte encore certains standards (« The Story » de J. Moody, « Lil’l Darlin » de Neal Helfti) il prouve ce qu’il fut : non seulement un créateur et un chanteur exceptionnel mais aussi  un maître arrangeur et un multi instrumentiste : piano bien sur mais saxophoniste, organiste.

 

Il reste avant tout ici ce qu’il  a toujours été  et demeurera : le maître du blues. Un blues riche décliné en variations et inventions. Ses premières grandes compositions montrent comment il le transforme. « Stick and Stones », et bien sûr « What’d’I Say » envoient le jazz vers le rock et la pop dont finalement le Genius restera un pionnier.

 











Quant  à l’album remasterisé en stéréo il donne le concert en son entier avec bien sûr les limites techniques des prises live de l’époque. La batterie  s’y fait sourde et imposante au détriment des autres instruments. Mais cela donne une patine évocatrice  à un temps d’émergence et transforme ce set en concept-album qui évite les versions standards des versions studio afin d’offrir un ensemble cohérent à la couleur particulière. Et ce  au moment où à la tête de son premier big bang et accompagné des Raelets, Ray Charles allait époustoufler, après les  USA, l’Europe lors de son nouveau « tour » sur le vieux continent.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Ray Charles, « Live at Newport 1960 », Frémeaux et associés, 2016.
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