Gauguin, peindre jusqu’au bout de soi

Deux livres paraissent opportunément sur Gauguin.
L’un est la réédition de l’ouvrage initialement publié en 1989, lors de la grande et mémorable rétrospective Gauguin au Grand Palais, dont la commissaire était précisément Françoise Cachin, première directrice du musée d’Orsay, puis nommée à la tête des musées de France.
L’autre est un parfait fac-similé de l’ouvrage que l’artiste rédigea durant son séjour à Tahiti.

En ouvrant ce livre à la présentation d’un soin extrême, on est surpris par la fluidité et la régularité de l’écriture de Gauguin, comme si les mots venaient naturellement dans la pensée de l’auteur, obligeant la main à en suivre le rythme et les modulations. Lecture d’autant plus attrayante que les pages sont littéralement ornées de dessins en couleurs, de constellations venues des Tropiques aux teintes vives, de croquis aux lignes simples proposant à l’œil autant qu’à l’esprit un voyage dans un monde autre, nouveau, un paradis d’avant sa disparition, les phrases et leurs décorations s’unissant dans une même éloquence.
Gauguin prend le soin d’inclure une table des matières, comme pour indiquer le chemin à suivre vers ses propres réflexions.
 

Les titres donnent une idée de ce qui intéresse l’écrivain et de ce qu’il veut partager, la création, l’éternité de la matière, la naissance des étoiles, des légendes locales…Le texte qui "oscille entre long poème cosmogonique et récit ethnographique", ainsi que le note avec beaucoup de finesse Bérénice Geoffroy-Schneiter qui le présente et le commente, s’achève par un mot révélateur, "absence". La transcription qui constitue la troisième partie de ce livre permet de suivre le texte initial.  
Un merveilleux livre d’artiste.

C’est encore au Grand Palais que s’est récemment ouverte la nouvelle exposition Gauguin, l’alchimiste.
La parution du livre qui a pour titre Ce malgré moi de sauvage reprend la vie et l’œuvre du peintre, suit son odyssée aussi fascinante que tragique, fait référence à son ascendance qui l’a ancré dans l’exotisme, relate le parcours créatif de Pont-Aven aux Marquises, lorsque "Gauguin atteint à une véritable grandeur dans son exil volontaire, son ultime dépouillement", écrit Françoise Cachin.
Le livre commence par la première page de l’Ancien culte mahorie.
Il se termine par des témoignages et des documents. Deux guides à avoir pour suivre avec un plaisir renouvelé la visite et élargir ses connaissances sur "Gauguin le terrible", selon les mots de Guillaumin à Pissarro.   

 

Dominique Vergnon 

Paul Gauguin, Ancien culte mahorie, présenté par Bérénice Goeffroy-Schneiter, 21,5x17 cm, 40 illustrations, Gallimard, octobre 2017, 96 pages, 25 euros.

Françoise Cachin, Gauguin, « ce malgré moi de sauvage », 12,5x17,8 cm, 180 illustrations, Gallimard, collection Découvertes, octobre 2017, 196 pages, 15,90 euros.

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