Paul Greveillac : architecture fin de siècle et art nouveau

L’architecture hongroise de la première moitié du XIXe siècle était caractérisée par un style nationaliste classique. L'évolution de Budapest se signale par le puritanisme, la sobriété, la mise en forme modérée des bâtiments. Les architectes Mihály Péchy, Mihály Pollack et surtout József Hild créent l’aspect classique de la capitale naissante (palais de Lloyd, maison de Tänzer).
Certes peu à peu le romantisme apparaît influencé par l’utilisation d’éléments orientaux. L'architecte le plus important de la seconde moitié du siècle est  Miklós Ybl : son influence est évidente dans la diffusion de l’histoire par un style néo-Renaissance. Son Opéra et sa Maison des douanes  préludent à la résurrection du style gothique et roman.

Au tournant du siècle, différents locataires éclectiques et néo-baroques veulent réinventer le paysage urbain. Entre  technologie internationale spécifique et caractère national concret, des architectes font en quelque une sorte sécession typiquement hongroise et lorgnent vers l’avant-garde.
Le roman de Greveillac ramène à cette époque.  À savoir aux dernières années du XIXe siècle : le héros Lajos Ligeti, apprenti architecte, quitte Vienne pour Budapest. Porté par le rêve de bâtir, il découvre une capitale vieillotte et endormie où tout est à refaire. Mais pour construire la ville, il faut séduire patrons et donneurs d’ordre et manœuvrer contre des concurrents redoutables dont Budapest reste la chasse gardée.

Inspiré par sa muse et modèle Katarzyna, épaulé par un maître d’œuvre madré, Lajos Ligeti s’obstine. Le héros lutte pour imposer son style visionnaire et par ses créations de béton il milite pour à un art nouveau. Etranger et juif, porté par sa passion, il ne voit pas venir les précipices de l'Histoire au moment où l'empire Austro-Hongrois commence à vaciller.

L'artiste devient une sorte de modèle d'architecte moderne et d'un art nouveau – inspiré sans doute par Béla Lajta (1873-1920). Le romancier incarne superbement celui qui cherche de nouvelles voies pour l’expérimentation architecturale et appartient aux innovateurs. Certes la Première Guerre mondiale signera un très grave échec dans l’histoire de l’architecture hongroise dont le héros reste le perdant magnifique. Et l'auteur en fait jaillir superbement sa vie invisible comme il le fit avec sa biographie romancée du compositeur Alfred Schnittke.
 

Jean-Paul Gavard-Perret
 

Paul Greveillac, Art Nouveau, Gallimard, août 2020, 288 p.-, 20 €
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