Patrick Fort : contre l'oubli

Comprendre l’inexplicable demeure ce qui intéresse Patrick Fort. Mêlant fiction et documents, avec Le foulard rouge, l'auteur invite le lecteur à aller au-delà des simples apparences, illusions et désillusions du passé. Et ce, à travers une réflexion sur l’amour et l’histoire – celle de la Guerre d'Espagne puis de la Résistance.

Le héros – Giovanni Fontana – s'est exilé du monde sur la côte landaise après avoir connu l’errance et l’exil. Longtemps plus tard une lettre le rapporte à l'endroit où sa vie changea de cap. Là où il avait d'abord découvert puis perdu l'amour de sa vie. Il doit désormais revenir à Gurs dans le Béarn. S'y dressait  un gigantesque camp d’internement ouvert en 1939 suite à la guerre d'Espagne. Il  servit ensuite à d'autres internements jusqu'à la fin de la guerre et avant qu'on en fasse disparaître les traces.

C'est sans doute là que l’attend Maylis, la femme qui le hante et à qui il adresse son chant : J’aurai tout perdu quand tu m’auras oublié. Nous aurons tout perdu quand on nous aura oubliés. Ne les laissons pas nous voler notre mémoire
Et à partir de là le roman retricote le temps avec les aiguilles de l'impossibilité de l'oubli en une forme de pardon et aussi de rédemption.

Au précis de décomposition du temps s’oppose donc l'espoir fantasmé d'un recommencement. Il permet de franchir certaines barrières. La fiction triomphe car si elle ne se détourne pas de l’histoire elle propose bien plus qu'un simple rite d’évasion idéaliste. Existe là une expérience de l’indicible capable d’ouvrir l’être à une liberté face au malaise de l'existence. Elle  dresse un monument de paix face à tous ceux consacrés aux morts. .


Jean-Paul Gavard-Perret

Patrick Fort, Le foulard rouge, Gallimard, février 2020, 368 p.-, 21 €
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