Jean Marc Sourdillon : exercice de perfection

Éditeur des Œuvres de Philippe Jaccottet dans la Pléiade Jean Marc Sourdillon a déjà publié des livres poétiques importants. Depuis  Les Tourterelles jusqu'à En vue de naître. Son dernier livre devient  en quelque sorte la suite. Il reprend la question de l'existence pour lui donner des réponses qui ne soient pas ponctuelles et anecdotiques en les ressourçant à une poétique des lieux. Plus même il espère trouver l'unique affirmation que toutes les autres nous cachent en nous leurrant.

Pour la saisir l'auteur utilise vers, versets et proses.afin de la faire résonner. Autrement dit, il s'agit de multiplier le souffle et prendre à contre-pied les aplombs que donnerait une trop grande continuité. Par divers halètements,  l’état respiratoire  plonge dans l’émotion.
Celle-ci arrive n’importe quand et avec n’importe quoi : tous les matériaux de la vie peuvent déclencher des mots. Ils pourront faire un début de poème et garder leur élan jusqu’au texte entier.

Mais cela ne suffit pas à Sourdillon. Par un lent travail de maturation il fait de sa poésie une œuvre d'exigence et d'intelligence même si elle reste toujours et avant tout un exercice d'ignorance afin que l'écriture échappe au discursif, au logos rationnel.
Le poète demeure accroché à une espèce d’idéal. Il est peu facile à atteindre et reste rare. Il y a donc toujours un temps d’ajustement pour l'advenir d'une beauté calme et ce qui la fonde : L'intensité de l'instant, les premières fois, la rencontre et l'approche de l'autre, la naissance chaque jour à la vie.

Dans cet exercice Sourdillon fait preuve de métier. Presque trop peut-être. L'élégance et la maîtrise sont souvent si parfaites.  Si bien qu'une sorte d'empêchement au nom d'une perfection laisse difficilement s'ouvrir des brèches nécessaires. Elles permettraient de plonger en ce que l'auteur espère. Mais a-t-il trop peur des gouffres? Cède-t-il à un culte du beau qui limite de tels glissements ?

Néanmoins, cela  n'enlève en rien au mérite d'un poète engagé dans sa quête. Elle est parfois trop lisse en son sacrifice à une impeccabilité formelle en opposition à ce qui n'appartient pas à notre monde et son (dés)ordre. A trop vouloir incliner dans la fraicheur de paysages des sécheresses se dérobent. Preuve que Jaccottet n'est jamais loin du poète : peut-être devrait-il "tuer" le père.... Mais implicitement tout cela suit son cours.


Jean-Paul Gavard-Perret
 

Jean Marc Sourdillon, L'unique réponse, coll. Blanche, Gallimard, novembre 2020, 112 p.-, 14 €
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